Inspection générale des Finances - N° 2003-M-O20-04
Inspection générale de l'Administration des Affaires culturelles - N° 2003-28
Inspection générale de l'Administration de l'Education nationale et de la Recherche - N° 03-047
Etabli par
Ann Bolliet, Inspectrice générale des Finances
Sarah Bouquerel, Commissaire Contrôleur des Assurances
Jacques Charpillon, Inspecteur général de l'Administration des Affaires culturelles
Gérard Chomier, Inspecteur général de l'Administration de l'Education nationale et de la Recherche
JUILLET 2003
INTRODUCTION
Après trente ans de développement en marge du texte fondateur de l'archéologie en France, la " loi Carcopino" du 27 septembre 1941, l'archéologie préventive a conquis sa légitimité: la loi du 17 janvier 2001 relative à l'archéologie préventive, en même temps qu'elle traduit en droit français les engagements européens figurant dans la Convention de Malte, consacre cette discipline comme mission de service public participant à la sauvegarde et à l'enrichissement du patrimoine national. Cette loi confirme et précise son mode de financement par les aménageurs ainsi que le rôle de l'Etat prescripteur. Il s'agit là d'acquis très importants qui ne sauraient être remis en cause.
Pourtant, cette loi, attendue depuis de nombreuses années, a suscité de nombreuses critiques des aménageurs, des collectivités territoriales et de certains parlementaires; elle n'a pas permis de concilier les deux grands objectifs d'intérêt général que sont l'aménagement du territoire et l'archéologie préventive. Le service public de l'archéologie préventive n'a pas su trouver la forme organisationnelle qui lui aurait permis de s'inscrire dans la durée et de s'intégrer dans la vie des territoires. De ce fait, l'archéologie préventive est à la recherche d'un nouvel équilibre. Elle est encore, d'une certaine manière, en crise, comme en témoigne ce rapport d'audit, le 22ième du genre consacré à cette discipline en une vingtaine d'années.
Compte tenu de l'ampleur des dysfonctionnements, un projet de loi a été mis en chantier par le ministère de la culture et de la communication dès le premier trimestre 2003. Il a été adopté en conseil des ministres le 31 mai dernier et en première lecture par le Sénat le 17 juin dernier.
Parallèlement, pour évaluer le dispositif issu de la loi du 17 janvier 2001 et émettre un avis sur la réforme alors en préparation, le principe d'une mission conjointe, confiée aux inspections générales des finances et de la culture en liaison avec celle de la recherche, a été décidé par les ministres (Cf. lettre de mission en annexe n°l).
La mission a travaillé dans un contexte assez inhabituel:
-une situation sociale très dégradée. En raison de leur hostilité au projet de loi réformant l'archéologie préventive, une grande partie des personnels de l'INRAP s'est mise en grève entre avril et fin juin 2003. Des chantiers de fouilles ont alors été bloqués, de même qu'une grande partie des systèmes informatiques et téléphoniques des structures régionales de l'établissement, interdisant de ce fait de nombreux entretiens ou le traitement des demandes d'information de la mission;
-des difficultés dans la conduite de l'audit du fait de l'élaboration en parallèle d'un projet de loi par le gouvernement, certains thèmes de l'audit pouvant perdre de leur intérêt au regard des modifications envisagées par celui-ci. La mission a rédigé, à la demande des ministres, une note d'étape le 4 avril 2003 et deux notes particulières, jointes pour mémoire au présent rapport, portant la première sur les conditions d'élaboration du budget 2003, la seconde sur l'évaluation du produit de la nouvelle redevance d'archéologie préventive prévue par le projet de loi;
-de sérieuses difficultés tenant à l'absence de documents comptables ou budgétaires ainsi qu'à des dysfonctionnements des systèmes d'information. La mission n'a pu, par exemple, avoir connaissance des coûts réels des opérations mais seulement de coûts prévisionnels et partiels.
" L'archéologie préventive est partie intégrante de la recherche scientifique " : ce mythe fondateur, érigé en principe à valeur législative par l'article 1er de la loi du 17 janvier 2001, est partagé par la communauté des archéologues, quel que soit leur rattachement, ainsi que par la plupart des forces syndicales. Ce large consensus est à l'origine de la loi du 17 janvier 2001 : celle-ci devait donner aux archéologues des outils de puissance publique et les moyens institutionnels et financiers d'exercer leur mission de service public, sous l'égide de la recherche scientifique. Elle devait permettre de faire passer les archéologues du statut d'auxiliaire du BTP à celui de chercheur.
Cette loi confère à l'archéologie préventive tous les attributs supposés nécessaires à une mission de service public : un établissement public administratif national, l'INRAP, des emplois publics — 1400 agents contractuels de droits public dérogeant au statut général, auxquels s'ajoutent des personnels recrutés sous contrat à durée déterminée (CDD) — et un financement public.
Dès lors, pour la communauté des archéologues, les acquis de la loi précitée devraient, dans leur ensemble, être préservés: les problèmes rencontrés étant essentiellement d'ordre conjoncturel, de simples ajustements financiers devraient permettre d'y remédier. Ces difficultés ne sont en aucune manière analysées comme un échec de la loi du 17 janvier 200 l, pouvant conduire à des interrogations sur ses fondements même. Au contraire, la remise en cause, par le projet de loi, du monopole de fait de l'INRAP, à ce stade pourtant largement théorique, est perçue comme une atteinte potentielle à la qualité scientifique des opérations d'archéologie préventive.
Or, pour la mission, la crise de l’INRAP et de l’archéologie préventive ne s’analyse pas seulement comme une crise conjoncturelle qu’une réforme financière suffirait à résoudre. Les dysfonctionnements mis en évidence au cours de l’audit sont nombreux, l’absence de budget et de comptes financiers clôturé ou le déficit budgétaire n’étant que le signal de ces dysfonctionnements.
L'inquiétude des personnels de l'INRAP et le profond malaise des services déconcentrés de l'Etat, les services régionaux de l'archéologie (SRA) des directions régionales des affaires culturelles (DRAC), soulignent, s'il en était besoin, la profondeur de la crise.
Si le projet de loi réformant l'archéologie préventive peut apporter une réponse appropriée à la question du financement et tracer une première piste pour la sortie du monopole, 'il ne saurait bien évidemment régler tous les problèmes qui se posent aux pouvoirs publics sur l'organisation de l'archéologie préventive: management interne de l'établissement, pilotage par les tutelles, place de la recherche, ancrage territorial et surtout préparation des évolutions à moyen terme, toutes questions qui exigent une réflexion approfondie et sans tabou sur les référents de l'archéologie préventive. Partie intégrante de la recherche scientifique, ce qui ne va pas de soi, cette discipline n'est-elle pas aussi une activité économique engendrant des emplois et participant à l'aménagement des territoires?
Il a semblé inopérant à la mission de proposer la remise en cause, à ce stade, de la solution organisationnelle retenue par la loi du 17 janvier 2001 d’un établissement public administratif. C’est dans le cadre d’une " refondation " de l’archéologie au plus près des territoires que devraient s’inscrire à moyen terme les évolutions institutionnelles nécessaires.
Le présent rapport est établi à partir de la mise en œuvre de la loi du 17 janvier 2001 et tient compte des objectifs et modifications envisagés par le projet de loi modifiant cette loi, en cours de discussion au Parlement. n présente une synthèse des observations, dysfonctionnements et recommandations de la mission à partir des fils conducteurs esquissés dans la note d'étape du 4 avril 2003, les descriptions et analyses étant systématiquement reportées en annexe.
I - DES SON PREMIER EXERCICE L'INRAP CONNAIT UN DEMARRAGE DIFFICILE, FAUTE NOTAMMENT D'UN PILOTAGE SUFFISANT DE LA PART DES SERVICES DE L'ETAT
Le dispositif réformant le fonctionnement de l'archéologie préventive en application de la loi du 17 janvier 2001 a été mis en œuvre en février 2002 avec la création de l'institut national de recherches archéologiques préventives (INRAP) qui a repris les compétences exercées antérieurement par l'association pour les fouilles archéologiques nationales (AFAN).
Très vite, de graves dysfonctionnements sont apparus:
1 -Le mécontentement grandit rapidement
Dans ce contexte, le mécontentement et les critiques de ceux qui étaient intéressés, d'une façon ou d'une autre, à l'archéologie préventive commencent à s'exprimer avant même la fin du premier exercice, dès l'été 2002. Il s'agit des aménageurs, d'élus locaux ainsi que d'archéologues de terrain exerçant ailleurs qu'à l'INRAP.
Ce mécontentement s'est concrétisé par le vote, lors de la loi de finances pour 2003, d'un amendement parlementaire réduisant de 25% le produit des redevances d'archéologie à percevoir en 2003. Le risque de réduction d'activité entraîné par cet amendement — qui n'est pas à l'origine des difficultés de l'INRAP — a conduit le ministère de la culture et de la communication à envisager la modification du dispositif financier existant. Le projet de loi actuellement devant le Parlement devrait donc, en partie, répondre aux critiques encourues par le dispositif en vigueur.
Les relations avec les aménageurs se sont rapidement et fortement dégradées.
Plusieurs motifs expliquent le mécontentement des aménageurs, dont certains sont des 6lus locaux assurant la maîtrise d'ouvrage de projets de zones d'aménagement concerté (ZAC) et de lotissements : l'augmentation des coûts des opérations d'archéologie préventive et leur imprévisibilité, l'accroissement des délais de libération des terrains, l'inéquité dans le traitement des zones rurales et urbaines et le mode de calcul.
Par rapport au système antérieur de l' AFAN, que la plupart des aménageurs considéraient comme du " racket organisé ", 80% d'entre eux ont acquitté des sommes moins importantes: ce fait, pourtant positif, n'a été mis en évidence par personne. Au contraire, les 20% d'aménageurs devant s'acquitter de sommes plus élevées qu'auparavant ont fait entendre leur mécontentement, d'autant qu'il s'agissait le plus souvent d'opérations situées en milieu rural: 22% des diagnostics en milieu rural et près de la moitié des fouilles en milieu non stratifié, qui sont essentiellement le fait des zones rurales, sont plus chers.
La contestation donc ainsi essentiellement nourrie par le sentiment que les zones rurales sont les maltraitées de la réforme et que les zones urbaines bénéficient au contraire d'exonérations, comme la construction de logements aidés (HLM) ou de logements pour leur propre compte par des personnes physiques. L'extension aux lotissements de cette exonération a renforcé ce sentiment d'inégalité de traitement entre la ville et le monde rural.
Le mode de calcul de la redevance de fouilles est différent selon que la structure peut être qualifiée de " complexe " ou " non complexe ". Le choix de la qualification -qui ne repose sur aucun critère précis prévu par les textes -est considéré comme subjectif par les aménageurs et, de ce fait, sujet à contestation. Lors du montage financier de l'opération, l'aménageur n'est pas en mesure de prévoir le montant de la redevance qui lui sera demandée et de l'intégrer à l'équilibre financier.
A la différence du système antérieur qui conduisait nécessairement l 'aménageur et l' AFAN à se mettre d'accord sur un prix, les aménageurs ont vivement critiqué le fait de recevoir l'avis de paiement de la redevance sans discussion possible ou information préalable. Il était pourtant normal que le passage d'un prix négocié à un impôt conduise à une telle modification. Cette critique met en évidence la mauvaise compréhension par les aménageurs de la logique de financement créée par la loi du 17 janvier 2001, ceux-ci n'ayant pas réellement conscience de s'acquitter d'un impôt. Elle souligne, s’il en était besoin s'il en était besoin, l'absence d'explications et de communication lors de la mise en œuvre de cette loi. En même temps, de nombreuses contestations conduisent l'INRAP à corriger le montant des redevances soit en requalifiant une opération " complexe" en " non complexe ", soit en tenant compte d'une exonération, ce qui souligne la fragilité des critères de liquidation et l'ambiguïté d'une taxe, finalement assez modulable sous la pression des mécontentements. Dans ces conditions, il était légitime que le retour à un prix, c'est -à -dire à une négociation, soit recherché dans le projet de loi en cours de discussion.
Dans les cas où le montant de la redevance calculée par l'INRAP est manifestement trop élevé, on voit se négocier des " arrangements ", le plus souvent sous l'égide des préfectures, qui permettent de diviser par trois (ou plus) le coût de l'opération pour l'aménageur (exemples de Chelles ou d'Oloron- Sainte -Marie).
Enfin, certains aménageurs se sont plaints d'un allongement des délais de libération des terrains. En l'absence de suivi de ces délais, avant et après la création de l'INRAP, on ne peut que constater une tendance à l'allongement des délais moyens, qui s'explique vraisemblablement par la lourdeur de la procédure conventionnelle. A cela, s'est ajoutée courant 2003, pour certaines opérations, l'attente du démarrage des travaux faute de CDD.
L'importance des délais pour les aménageurs a été sous-estimée dans la loi du 17 janvier 2001 et mérite d'être traitée avec rigueur et précision dans le projet de loi en cours de discussion: elle se traduit souvent par des coûts supplémentaires pour l' aménageur du fait notamment du renchérissement des intérêts intercalaires; de plus, dans certaines opérations, l' aménageur est engagé contractuellement sur des délais. C'est le cas notamment des nouvelles concessions autoroutières pour lesquelles l'Etat concédant a fixé et négocié une date de fin de construction. Il importe que l'Etat, tutelle des services archéologiques, ne puisse mettre en défaut un objectif qu'il s'est lui -même donné en tant que concédant.
Certains aménageurs regrettent que l'INRAP ne soit pas en mesure de tenir ses engagements (délais, moyens humains engagés...) et soulignent,. face aux interventions croisées de la direction générale de l 'INRAP, de l'interrégion ou du SRA, l'absence d'interlocuteur unique et responsable.
Désormais, pour les aménageurs confrontés à ces difficultés et à ces incertitudes, l’archéologie préventive constitue un " risque aggravé " que ceux-ci doivent intégrer, à coté des risques habituels pouvant peser sur l’équilibre de leurs opérations (risque travaux, risque géologique, risques de procédures …). Pour les aménageurs de " linéaires " (routes, autoroutes, TGV …), les revendications portent davantage sur le respect des délais que sur les coût. Le reproche est inverse pour les constructeurs de logements, pour lesquels la question du coût est la plus aiguë.
La loi du 17ianvier 2001 a réduit la part de marché occupée auparavant par les archéologues regroupés dans des associations ou des sociétés.
L'INRAP, qui s'est vu reconnaître un quasi monopole des opérations d'archéologie préventive par la loi précitée, est aujourd'hui l'employeur quasi exclusif d'archéologues préventifs en France. Pour autant, il n'est pas le seul.
La mission a pu s'entretenir (Cf. annexe 6) avec quelques uns des animateurs de structures autres que l'INRAP opérant en matière d'archéologie préventive! : il existe, en dehors de cet établissement, un nombre significatif d'archéologues, susceptibles de constituer, pour l'avenir, le socle d'une archéologie plus diversifiée. De manière générale, il s'agit d'archéologues qualifiés et compétents: compte tenu des réticences de nombre de SRA à leur égard, leur travail fait en effet l'objet d'un contrôle très étroit qui garantit, sauf exception, une qualité des investigations archéologiques égale à celles de leurs collègues de l' AFAN puis de l'INRAP .
2300 à 2500 personnes environ exercent en France le métier d'archéologue, sans compter les bénévoles. 800 à 900 sont employés par les universités et les instituts de recherche ainsi que par les services de l'Etat, ces derniers regroupant 320 archéologues environ. Les autres, 1400 à 1500 archéologues, sont potentiellement susceptibles d'intervenir en archéologie préventive. Si 80 % au moins (1200 environ) sont agents de l'INRAP3, entre 15 et 20 % sont employés dans d'autres structures: près de 200 relèvent de services archéologiques des collectivités territoriales; 50 à 100 sont employés par de rares structures commerciales (RADES et ANTEA) ou par des associations, souvent dépendantes de collectivités territoriales.
Selon les informations recueillies part la mission, les petites entreprises et associations auraient occupé, avant la loi du 17 janvier 2001, là où elles existaient, entre 30 % et 40% d’après elles, du " marché " de l’archéologie préventive mesuré en nombre d’opérations, .notamment dans certaines régions (exemple: l'Alsace avec ANTEA) ou dans les milieux urbains où l' AFAN était moins présente. Il est difficile de mesurer exactement la perte d'activité de ces structures car les services régionaux de l'archéologie leur confiaient l'exécution d'opérations souvent sans procédure particulière et ne disposent pas de statistique.
En tout état de cause, la loi précitée a interdit toute transmission de prescription à ces structures, ce qui s'est traduit par le licenciement d'une partie des salariés et la recherche de nouvelles activités (photogrammétrie, médiation auprès du grand public, recherche documentaire...). Dans certains cas, cette évolution avait été précédée par des relations extrêmement dégradées entre ces structures et certains conservateurs des SRA (ex. : Midi-Pyrénées ou Nord-Pas-de-Calais) à la suite notamment de l'application d'une circulaire du 16 octobre 1998 recommandant, dans des conditions juridiques douteuses, de privilégier l'AFAN. Des contentieux ont d'ailleurs été portés devant les tribunaux.
Si rien n'est fait, ces difficultés pourraient perdurer, voire s'amplifier au cours de l'année 2003, consacrant ainsi dans les faits le monopole de 1'INRAP. Alors que le projet de loi réformant l'organisation de l'archéologie préventive a, parmi ses objectifs, celui d'ouvrir cette activité à d'autres acteurs qualifiés que 1'INRAP, il serait ainsi paradoxal de laisser la loi du 17 janvier 2001 continuer à produire ses effets par la réduction de l'activité de ces petites structures.
1 - La mission a été très peu informée par les différents échelons de l'administration de l'existence de ces structures.
2 - Le terme d'" archéologue" n'est pas une appellation contrôlée: selon le cas, il s'agit du titulaire d'un diplôme (maîtrise, DEA ou doctorat) ou de quelqu'un qui exerce une fonction sans avoir nécessairement ce niveau de diplôme, comme les techniciens archéologues.
3 - Le personnel administratif de l'INRAP étant compté à part.
C’est la raison pour laquelle la mission recommande, pour assurer la pérennité de ces structures dans l’attente de la pleine application des dispositions prévues par le projet de loi en discussion, de les " soutenir " en demandant à l’INRAP de leur confier l’exécution de prestations (diagnostics et fouilles préventives).Même si le dispositif législatif et réglementaire actuellement en vigueur ne prévoit pas explicitement de convention entre l'INRAP et des structures privées, rien n’interdit à l’établissement de leur sous-traiter l'exécution d'une partie des prescriptions.
Les préfets de région et les DRAC concernés devraient être rapidement alertés et directement mandatés par le ministre pour s’assurer de la réalité de cette sous-traitance.
Enfin, ce qui peut davantage surprendre, les conservateurs des services régionaux de l'archéologie (SRA) ont mal vécu la réforme de l'archéologie préventive et mal perçu ses enjeux financiers, ce qui s'explique, pour partie, par l'insuffisance de pilotage et d'accompagnement de cette réforme par l'Etat.
2 -L'absence de pilotage par l'Etat est une donnée importante de la crise rencontrée
Avant la loi du 17 janvier 2001, l'AFAN était une agence de moyens exécutant les opérations que lui confiaient les services déconcentrés de l'Etat (SRA) sans que la répartition des tâches entre l'AFAN et les SRA soit claire. Ainsi, si les SRA émettaient les prescriptions, ils intervenaient aussi fréquemment en faisant eux-mêmes et à peu de frais des détections et des diagnostics, souvent par de simples reconnaissances sur le terrain, ne donnant pas lieu à commandes à l' AFAN.
L'intervention de la loi précitée s'est traduite au plan opérationnel par une évolution significative: le transfert à l'INRAP d'une partie des charges exercées jusque-là par l'Etat (SRA) dans le cadre d'une définition précise des tâches relevant de la responsabilité de l'Etat et de celles de l'INRAP. Selon les textes, les services régionaux de l'archéologie (SRA) prescrivent les opérations d'archéologie préventive, désignent les responsables, délivrent les agréments, contrôlent et évaluent les opérations; l'INRAP, de son côté, instruit les prescriptions, établit les projets d'intervention et en assure la réalisation ainsi que l'exploitation scientifique.
Cette évolution s’est opérée sans pilotage suffisant par l’Etat, que ce soit à l’égard de ses propres services déconcentrés, qui se sont sentis déstabilisés, ou à l’égard de l’INRAP dont la charge de travail n’a pas été encadrée.
Les SRA n'ont pas accompagné la mise en place de l'INRAP et ont prescrit massivement.
Un grand nombre des conservateurs rencontrés regrettent que la loi ne leur permette plus de faire eux- mêmes des diagnostics. Ils craignent de "perdre la main " et considèrent que leurs tâches se sont appauvries en se bureaucratisant. De plus, à leurs yeux, ce partage des tâches n'apporte pas de plus- value: auparavant, le cahier des charges de l'opération d'archéologie préventive ainsi que le chiffrage des moyens humains nécessaires étaient réalisés par les SRA, l' AFAN établissant la facture. Il appartient désormais à l'INRAP d'élaborer les projets d'intervention, de définir la nature et la quantité de moyens humains et matériels à affecter à chaque opération et de négocier avec les aménageurs la date et la durée de l'intervention. Nombre de SRA se sentent dépossédés des négociations avec les aménageurs, même s'il est apparu à la mission qu'en cas de difficultés, les SRA, sollicités par le préfet, étaient en première ligne.
L'absence de pilotage par l'Etat se mesure, en première analyse, à l'augmentation apparente du nombre de prescriptions. Les chiffres sont instructifs mais difficiles à interpréter dans la mesure où aucune réelle comparaison ne peut être faite entre l'AFAN et l'INRAP : en 2001, dernière année d'exercice de l'AFAN, celle-ci a reçu 1930 commandes des services de l'Etat. En 2002 (sur 11 mois), l'INRAP a reçu 4255 prescriptions.
Années | Diagnostics | Fouilles | Total * |
2001 (AFAN) | / | / | 1930 commandes |
2002 (11 mois) | 3783 | 472 | 4255 prescriptions |
2003 (1er janvier à 30 avril)** | 1000 | 206 | 1206 prescriptions |
(*) : ce total comprend toutes les opérations, y compris celles qui sont abandonnées après prescription et celles qui sont achevées. Il ne s'agit donc pas du stock restant à réaliser.
(**) Les données à fin mai n'étaient pas connues à l'issue de la mission, fin juin.
Selon ces chiffres, la charge de travail théorique résultant des prescriptions aurait été multipliée par 2,5 en 2002 :
Les raisons de ce grand nombre de prescriptions en 2002 et début 2003 sont complexes
Les prescriptions sont des actes administratifs qui, en tant que tels, doivent être motivés. Cette motivation était restée embryonnaire. L’obligation de motivation, proposée par amendement sénatorial constitue un point très positif qui devrait conduire les conservateurs à davantage d’exigence et de sélectivité dans les prescriptions. A ce titre, la motivation des prescriptions – dès lors qu’elle ne se réduit pas à n formalisme très général et est spécifique à chacune – peut contribuer à une régulation plus efficace.
Le pilotage de l’archéologie préventive par l’administration centrale est largement défaillant
Cela s'explique par des raisons qui tiennent largement à l'histoire: la culture tant des services déconcentrés, les SRA, que de l'administration centrale reste marquée par la situation qui prévalait jusqu'en 1992, quand les directeurs des antiquités historiques et préhistoriques étaient des universitaires travaillant sur vacations pour le compte du ministre chargé de la culture. Cette configuration était peu favorable à l' expression de l’autorité hiérarchique acteur régionale des affaires culturelles. Aujourd’hui encore, la sous-direction de l’archéologie (direction de l’architecture et du patrimoine), peine à se faire reconnaître comme niveau hiérarchique de droit commun. En l’absence d’un pouvoir hiérarchique affirmé, l’organisation professionnelle des conservateurs prévaut.
Ainsi, il n'y a pas véritablement de réunions de chefs de service mais une " conférence des conservateurs" au cours de laquelle intervient le directeur de l'architecture et du patrimoine. Cette formule qui privilégie le rôle et les positions du collectif organisé des conservateurs ne constitue pas le bon vecteur de pilotage de l'administration: ainsi, lors de la " conférence " du 20 mai dernier, les conservateurs ont quitté la salle pour manifester leur opposition au projet de loi préparé par l'administration dont ils relèvent. Les directeurs régionaux des affaires culturelles n'ont que très peu de prise sur leurs services archéologiques; ils sont même encouragés à ne pas trop s'y intéresser comme en témoigne la circulaire du 3 mai 2002, présentant les décrets du 16 janvier 2002 relatifs à l'archéologie préventive (Cf. annexe 9 -1).
Même si le poids de 1 'histoire est prégnant, face à un dossier modifiant aussi profondément l'organisation de l'archéologie préventive comme le fait la loi du 17 janvier 2001, la sous-direction de l'archéologie n'a pas pris les initiatives qui s'imposaient pour surmonter le handicap du passé, accompagner la création de 1'INRAP et animer l'action des services régionaux d'archéologie. Certes, des assises interrégionales de l'archéologie ont été organisées fin 2002: si elles ont permis de sensibiliser les acteurs au nouveau dispositif, elles n'ont pas proposé d'outil de pilotage aux SRA, notamment dans l'acte difficile de prescrire
En pratique, il existe bien, tous les 3 ou 4 ans, des bilans de la recherche archéologique en France établis par le Conseil national de la recherche archéologique (CNRA): ces documents sont des catalogues des opérations de terrain, classés par thème ou par période, et en aucun cas des outils de programmation opérationnels pour les SRA.
Même si l'archéologie préventive tend à s'inscrire assez naturellement dans une logique d'aubaine pour engager les opérations en fonction des projets d'infrastructure et d'aménagement, rien n'interdit de mettre en place une programmation intégrant des éléments de sélection et de norD1e. Cet effort de programmation semblait d'autant plus nécessaire que des pratiques très hétérogènes préexistaient à la loi du 17 janvier 2001 : ainsi, par exemple, il y avait très peu d'archéologie préventive dans l'ouest de la France et davantage dans l'est; on pouvait constater, en milieu rural, des différences de 1 à 6 dans les moyens en personnel affectés à l’hectare fouillé par les interrégions de l’AFAN puis de l 'INRAP. Une des premières fonctions de la tutelle devrait donc être d’harmoniser les pratiques, à deux niveaux, celui des prescriptions d’une part, celui de l’affectation des moyens par la recommandation de ratio, d’autre part. Actuellement, ces éléments de pilotage n’existent pas. Chaque interrégion et chaque SRA font comme ils l'entendent : dans une interrégion, la mission a constaté que plus de 25% de la surface d'une ZAC de 42 hectares allait faire l'objet de fouilles, suite au diagnostic. Ce pourcentage avait été décidé localement par le SRA et le directeur de l'interrégion. Aucun argument, autre que celui de l'autorité scientifique, n'a pu être présenté à la mission pour la convaincre de la pertinence d'un pourcentage aussi élevé.
Actuellement, l'archéologie préventive n'est pas gérée et organisée dans une logique d'analyse des risques: risque de trouver ou non des vestiges archéologiques, risque de trouver des vestiges appartenant à une période mal connue dans une région ou relevant d'un type de vestige ou d'un thème encore peu investi. Ce type d'analyse devrait se traduire par une programmation sélective et hiérarchisée. Ainsi par exemple, si beaucoup de villas carolingiennes ont déjà été repérées et fouillées dans une région, il est peut-être envisageable de faire porter les efforts sur d'autres thèmes ou d'autres périodes. Cette démarche devrait s'appuyer sur un inventaire de l'existant, tenu à jour: c'est l'objet de la base de données connue sous le nom de "carte archéologique ", qui devrait constituer l'outil de base pour la programmation des services de l'Etat. Or, à ce jour, peu de moyens ont été consacrés à cet outil, qui est assez largement inopérant.
Il faut attendre le 28 mai 2003 pour disposer d'un projet de note de la sous-direction de l'archéologie sur la programmation scientifique de la recherche scientifique: en réalité, il ne s'agit pas vraiment d'une aide à la programmation à destination des SRA mais de la définition d'axes prioritaires de recherche associant le CNRS et l'archéologie " programmée ", ce qui ne constitue pas, à l'évidence, la priorité de la sous-direction de l'archéologie en matière d'archéologie préventive.
Il appartient aux services de l’Etat d’harmoniser des pratiques excessivement personnalisées, tant des SRA que des archéologue de l’INRAP, et de mettre en place une programmation acceptée par tous les acteurs comme support de la régulation des prescriptions.
La mission s'est étonnée que les opérations d'archéologie préventive n'aillent pas, sauf exception, au- delà de la période médiévale. Les opérations les plus fréquentes concernent la préhistoire et la protohistoire pour lesquelles l'acte de fouille est survalorisé dans la mesure, sans doute, où il n'est pas en " concurrence " avec les sources écrites et le travail de l 'historien. On trouve très peu d'opérations d'archéologie industrielle ainsi que d'archéologie du bâti. Corrélativement, les fouilles préventives sont beaucoup plus fréquentes en zone rurale qu'en milieu urbain. A cela, s'ajoute le domaine réservé de l'administration des monuments historiques sur le bâti, si bien que, de manière étonnante, le ministère de la culture et de la communication fait échapper une grande partie des monuments historiques aux prescriptions d’archéologie préventive. L’archéologie préventive urbaine est donc aujourd’hui encore largement minoritaire. Même si des raisons historiques peuvent expliquer cet état de fait, celui-ci mérite réflexion et une action vigoureuse de la tutelle pour éviter que l’archéologie préventive ne laisse de côté une part importante du patrimoine historique.
Enfin, il a semblé à la mission qu’un autre élément pouvait expliquer qu’on ait tardé à prendre les arbitrages qui s’imposaient pour limiter les effets du déséquilibre financier du dispositif : le partage de la tutelle exercée par le ministère de la Culture et de la communication entre une direction opérationnelle, la direction de l’architecture et du patrimoine, et une direction en charge des moyens et du budget , la direction de l’administration générale, ne favorise pas cet exercice et organise, d’une certaine manière, la déresponsabilisation partielle de chacune des deux directions. N’ayant pas à connaître des conséquences financières des activités de ses services, la Direction de l’architecture et du patrimoine ne disposait pas des signaux d’alerte nécessaires. La circulaire précitée du directeur de l’architecture et du patrimoine (cf. annexe9-1) est l’illustration de cet état de fait : " Il n’entrait pas dans l’objet d’un tel texte de traiter des conséquences financières de vos prescriptions ".En situation de crise, au moins, la direction de l’architecture et du patrimoine devrait être pleinement responsabilisée pour exercer l’ensemble des compétences de la tutelle, y compris dans ces états financiers.
II - LES DIFFICULTES PERSISTANTES DE L'-INRAP, NOTAMMENT EN MATIERE FINANCIERE ET ORGANISATIONNELLE, ONT NUI GRAVEMENT A SON EFFICACITE
Face à l'augmentation très importante des prescriptions qui lui étaient adressées par l'Etat, l 'INRAP, qui devait se familiariser avec des procédures d'achat et de gestion publics, terminer le stock d'opérations initiées par l'AFAN et s'inscrire dans une démarche scientifique s'est rapidement trouvé dans l'incapacité de mener à bien sa mission première, la production, dans les délais, d'opérations d'archéologie préventive.
A l'issue des travaux sur place de la mission (juin 2003), le budget 2003 n'était toujours pas adopté L'exécution par douzièmes provisoires s'est prolongée au risque de conduire à un niveau de dépenses effectif en 2003 supérieur de 7 à 10% à celui de 2002, alors même que le montant des charges devrait être réduit pour tenir compte du déficit prévisionnel.
La mission a constaté la difficulté pour les tutelles de procéder aux arbitrages nécessaires au moment opportun: un plan de promotions -recrutements portant sur 45 promotions et plus de 40 recrutements a été engagé courant décembre 2002 sans que les tutelles aient pu l'arrêter alors que la situation déjà déficitaire l'aurait justifié; les arbitrages préalables à la réalisation du budget 2003, pourtant disponibles début avril 2003, n'ont été pris que le 12juin 2003, ce qui a donné à l'INRAP le temps de pourvoir plus de 60 postes, réduisant d'autant les marges de manœuvre budgétaires.
1 - Les conditions de l'équilibre financier de l'INRAP ne sont pas réunies.
Les activités de l’INRAP sont structurellement déficitaires. Le premier exercice de l’INRAP devrait être déficitaire (12 à 15 M€), le second également (27 à 28 M€). A la différence du système antérieur, il n'y a pas de lien automatique entre le coût effectif d'une opération et le montant de la redevance. L'équilibre financier de 1'INRAP ayant été calibré sans déficit, il supposait une robustesse des prévisions de recettes et de dépenses, ce qui n'a pas été le cas : un " rendement" moyen de 140% avait été prévu entre le coût prévisionnel d'une opération et le montant de la redevance correspondante, de manière à dégager les moyens de financement de la structure et des activités de recherche. En réalité, ce rendement moyen semble s'établir aux environs de 100 à 110%, ce qui fait apparaître un " déficit" de rendement moyen par opération de plus de 20% par rapport aux évaluations. Même si cet écart doit être pris avec précaution car il repose, non sur les coûts réels mais sur des prévisions, on ne peut que s'étonner de la légèreté avec laquelle on a pu construire un système de financement à partir d'une telle prévision. Et cela d'autant plus qu'elle reposait sur une curieuse péréquation entre les opérations réalisées en milieu urbain, ne " rapportant " dans cette évaluation que 70%, le milieu rural produisant 170%. L'absence de réalisme critique aurait dû inquiéter.
En outre, en 2003, l'émission de titre de recettes a été très faible, voire, à certains moments, inexistante: la situation conflictuelle entre les aménageurs et 1'INRAP a conduit l'ordonnateur à suspendre l'envoi des titres de recettes. Ainsi, aucun titre (facture AFAN ou redevance) n’a été émis au cours du premier trimestre. Si l’émission de titres de recettes a bien repris à partir d’avril 2003, un risque subsiste quant au montant du déficit si le rattrapage est insuffisant.
A cette insuffisance de rendement des redevances, s'ajoute un facteur de risque supplémentaire: une partie des redevances comptabilisées en produits de l'exercice correspond en fait à des opérations abandonnées, donc à des recettes qui pourraient être qualifiées de fictives. Il n'y a pas, à l'heure actuelle., de suivi des prescriptions avec les aménageurs si bien qu'on ignore le taux d'abandon. L'identification, il -très court terme, des opérations abandonnées est déterminante pour évaluer le montant des recettes fictives éventuelles et présenter, dans une toute prochaine décision modificative, un budget en tenant compte.
Parallèlement à cette insuffisance de rendement des redevances, la trésorerie de l'établissement est défaillante. Après une avance de trésorerie de 23 M€ en 2002, qui doit être considérée comme normale au démarrage de l'établissement, mais qui, à ce jour, n'est pas remboursée et dont les intérêts ne sont pas provisionnés, la situation a continué à se dégrader. L 'INRAP a fait état d'un besoin de trésorerie global sur 2003 de 15 M€ fin mars 2003, de 16,5 M€ au 15 mai puis de 13 M€ au 27 juin. 5 M€ ont été apportés à ce titre fin juin 2003. A la différence de 2002, il ne s'agit plus d'une avance du Trésor mais d'une avance consentie par le ministère de la culture et de la communication sur ses propres crédits.
Les difficultés de recouvrement auprès des aménageurs sont bien évidemment à l'origine de cette situation: au 15 juin 2003, on comptait plus de 63 M€ de restes à recouvrer sur des titres de recettes de 2002 auxquels s'ajoutent 4,7 M€ de restes à recouvrer sur des titres de recettes émis en 2003. Au total, le tiers seulement du montant des redevances émises en 2002 a été recouvré (cette proportion s'élevant aux deux tiers pour la facturation AFAN). Dès le mois de janvier 2003, de nombreux aménageurs ont cessé de payer les redevances. Face à cette situation, le comptable n'a pas accompli les diligences prévues par la loi du 17 janvier 2001. Ce n'est qu'à l'arrivée sur place de la mission, début avril 2003, qu'une première lettre de relance a été adressée avec, il est vrai, peu de résultats à ce jour. Le contexte n'était pas simple pour le comptable qui devait faire face, d'une part, à l'engorgement de l'agence comptable, mais également, à la résistance d'aménageurs à un dispositif de financement contesté.
Compte tenu des difficultés financières de l’INRAP, le recouvrement des titres émis en 2002 et 2003 doit être relancé sans délai, avant la mise en œuvre d’un nouveau système de financement. A cet effet, il apparaît nécessaire de mettre en place, avant les congés d'été et en accord avec la direction générale de la comptabilité publique, un dispositif, s'il le faut dérogatoire, permettant d'apporter un appui à l'agence comptable (renforts par la comptabilité publique, assistance par les contrôleurs de gestion des interrégions).
L'apparition d'un déficit, non prévu dans le calibrage initial du dispositif, va conduire l'Etat à prendre en charge une subvention d'équilibre au titre des exercices 2002 et 2003. Si cette subvention doit, pour l'essentiel, être apportée par le ministère de la culture, la mission estime que le ministère en charge de la recherche, qui exerce une co-tutelle sur l'INRAP , devrait également y contribuer.
La mission attire l’attention sur le risque non négligeable de voir admis dans les faits et pérennisé le principe d’une subvention d’équilibre annuel. Cette perspective est d’ailleurs défendue de manière à peine voilée par d’assez nombreux interlocuteurs. Une action vigoureuse et rapide est donc nécessaire à la fois pour améliorer, pour l'avenir, le rendement des recettes de l'INRAP -ce qui est un des objectifs du projet de loi actuellement en discussion -mais aussi pour ajuster ses dépenses.
2 - Le passage d'une association à un établissement public a été mal maîtrisé.
Le passage d'une gestion privée (AFAN) à une gestion publique, impliquant notamment la séparation entre le comptable et l'ordonnateur, l'émission de titres de recettes ou le respect du code des marchés publics, n'a pas encore trouvé son régime de croisière.
De manière générale, on doit souligner la faiblesse de l'organisation comptable et financière, tant chez l'ordonnateur qu'à l'agence comptable: ainsi, 44 % des mandats 2002 ont été remis à l'agence comptable en 2003 du fait d'une défaillance du système informatique et de l'adoption tardive du budget; le taux de rejets des mandats reste élevé (9% actuellement) même si des progrès ont été réalisés (40% en octobre 2002). Actuellement, le service budgétaire de l'ordonnateur émet en moyenne 2300 mandats par mois. L'agence comptable ne parvenant à en traiter que 1440, un stock de mandats en retard s'accumule inéluctablement.
La mission a constaté la difficulté pour l’agence comptable et l’ordonnateur de s’inscrire dans un calendrier opérationnel et de s’y tenir : ainsi à l’arrivée de la mission, la production du compte financier 2002 était annoncée pour mi-juin ; cette date a été progressivement décalée à fin juin, à fn juillet et, en dernier lieu, à fin août. Les deux raisons qui expliquent ce retard mettent en évidence les dysfonctionnements du couple ordonnateur – comptable :
-le budget 2002 ayant été adopté tardivement, aucun mandat n'a pu être émis jusqu'en mai -juin 2002, ce qui a conduit à régler les fournisseurs par certificats administratifs. Près de six mois après la clôture de l'exercice, il restait encore 150 mandats -fournisseurs à régulariser. De plus, aucun suivi de ces certificats n'a été effectué si bien que certains semblent perdus;
-les relations sociales au sein de l'agence comptable sont très dégradées depuis la création de l'INRAP, la situation de grève ou de grève du zèle de quelques agents n'ayant pas cessé. Rien n'avait été fait, jusqu'à l'arrivée de la mission, pour qualifier l'insuffisance professionnelle des agents concernés et permettre ensuite à la direction d'engager les procédures adéquates. Ce processus, enclenché à l'encontre de 4 agents le 2 mai 2003, devrait être long. Des solutions devront donc être trouvées dans l'attente de son aboutissement.
Compte tenu de la situation, la mission recommande un audit de l’agence comptable.
3 - Les outils de gestion sont insuffisants et ne permettent pas d'éclairer les décisions.
L'absence de documents financiers et budgétaires, qui obère la capacité de prise de décision des dirigeants et des tutelles, est renforcée par les insuffisances des principaux instruments de gestion.
Les tableaux de bord, qui sont apparemment très nombreux et très fouillés, sont en réalité entachés d'un certain nombre de carences, qui en réduisent fortement l'usage et l'intérêt, et notamment:
En l'état actuel des choses, la comptabilité analytique, qui devrait. comporter une ventilation des charges par chantier, présente encore beaucoup d'insuffisances. Ce n'est que fin juin 2003, soit à l'issue de la mission, que le code chantier a pu être disponible pour l'ensemble des opérations 2002. Le logiciel d'extraction des données comptables permettant de ventiler par chantier les coûts de structures, les charges opérationnelles et de faire des tris par région et interrégion n'est opérationnel que depuis mai 2003, et encore, pour le seul contrôleur de gestion du siège.
Surtout, la comptabilité analytique ne permet pas de ventiler par chantier les charges de personnel et les frais de déplacement alors que ces charges représentent une part prépondérante des budgets prévisionnels d'opérations, 60 % pour les diagnostics et 80 % pour les fouilles.
Par ailleurs, il n'y a pas encore d'interface entre, d'une part, le logiciel de planification des moyens humains entre les opérations et le logiciel de paie et, d'autre part, entre ce dernier et le logiciel budgétaire et comptable, ce qui explique que, dans le budget 2003, les dépenses de personnel sont évaluées à l'aide de coûts moyens. Ces interfaces, indispensables à la connaissance du coût réel des opérations ou à la prévision budgétaire, devront être rapidement mises au point.
Enfin, actuellement, il n'y a pas de base commune de gestion opérationnelle et financière des opérations avec remontée automatique de données à partir des interrégions: cette situation ne constitue pas un contexte favorable au développement de la comptabilité analytique. Elle ne favorise pas non plus la diffusion d'informations de gestion auprès des interrégions, ce que leurs responsables regrettent.
L'insuffisance des outils de gestion conduit à une méconnaissance des coûts réels de production des opérations de l'exercice 2002. n s'ensuit que toute les simulations financières faites par l'INRAP sont basées sur des coûts prévisionnels et non pas sur des coûts réels constatés. n s'agit d'un handicap important qui empêche de calibrer avec une précision suffisante la redevance dans le projet de loi sur l'archéologie préventive en cours de discussion, de préparer correctement le budget 2003 ou de piloter avec efficacité les activités de l'établissement quand il faudra passer à une problématique de coût réel, ce qui sera le cas pour les fouilles dans le cadre de ce même projet de loi.
Il est donc nécessaire de remédier rapidement à l’insuffisance de ces outils de gestion avec l’appui d’un consultant (audit d’organisation, audit informatique).
4 - La gestion du personnel se préoccupe peu d'anticipation et de productivité.
Depuis la création de l'INRAP, les effectifs ont fortement augmenté : en 2001, l' AFAN comptait en moyenne 1295 CDI et 207 CDD, soit au total 1502 personnes représentant 1381 équivalents temps plein (ETP). Au 31 décembre 2002, onze mois après la création de l'INRAP, ces chiffres sont devenus 1333 CDI et 543 CDD, soit au total 1876 personnes représentant 1648 ETP. L'augmentation est donc de 374 personnes, soit de près de 25%, avec un doublement des effectifs en CDD. Elle s'exprime aussi en 267 ETP supplémentaires, soit une augmentation d'un peu moins de 20 %.
Trois raisons principales peuvent expliquer l'accroissement des effectifs:
Compte tenu de la situation financière de l'INRAP, la mission a proposé, dans sa note d'étape du 4 avril 2003, un "moratoire" des recrutements de CDI au niveau atteint à cette date, soit 1337 emplois. Faute d'arbitrage sans délai des tutelles, des recrutements ont été opérés entre avril et juin 2003, si bien que les postes budgétaires ont été fixés à 1405 à la mi-juin 2003.
Pour l’avenir, compte tenu, d’une part, des évolutions qui pourraient remettre en cause la place d’un établissement public national dans l’archéologie préventive (cf. partie IV), d’autre part, de l’incertitude sur le rendement du nouveau dispositif financier, il est nécessaire de mettre un terme à toute augmentation du nombre de postes budgétaires (CDI), voire de ne pas remplacer les départs. En clair, l'adoption du budget 2003 ne devrait s'accompagner d'aucune création d'emploi budgétaire supplémentaire.
Deux questions sont particulièrement préoccupantes, celle de la répartition par âge et celle de la productivité.
Plus des deux tiers des agents de l'INRAP ont entre 35 et 45 ans, les moins de trente ans étant très peu nombreux. Selon l'INRAP, certains commencent à avoir des pathologies liées à l'exercice d'activités de chantier qui impliquent assez souvent des postures de travail pénibles. Le vieillissement des agents constitue un risque d'aggravation d'autant plus préoccupant qu'il concerne la majeure partie des effectifs.
La mission a évoqué cette question tant avec les responsables de l'INRAP qu'avec ceux de la sous- direction de l'archéologie du ministère de la culture et de la communication: pour bon nombre d'interlocuteurs, la réponse se trouve dans le basculement des personnels les plus âgés vers les activités de recherche ou de médiation et le recrutement régulier d'agents plus jeunes. Ce discours est en cohérence avec la position des syndicats qui considèrent que l'optimum de l'INRAP se situe à 2000 CDI. Ce chiffre devrait permettre à l'INRAP de recruter tout ou partie des 300 archéologues de niveau DEA formés annuellement par l'Université. Cette réponse est, à l'évidence, peu corrélée avec la situation de la recherche (cf. partie III) et incohérente avec l'objectif d'une territorialisation de l'archéologie préventive. On ne peut que déplorer que la question du vieillissement n'ait pas été anticipée lors du choix de la formule de l'établissement public et qu'elle n'ait pas fait, depuis, l'objet d'une réflexion, ni même d'un suivi. Cette carence est d'autant plus lourde de conséquences qu'il s'agit de contractuels de droit public.
La productivité de l'établissement semble faible.
Le nombre de jours travaillés par ETP, qui ressort en moyenne annuelle sur 2002 (CDI et CDD confondus) à 168 jours (cf annexe 5, pièce jointe n°6) est apparu à la mission peu élevé : au-delà des 45 jours de congés payés et de RTT, le décompte fait apparaître 16 jours d'absences diverses et de congés sans solde, qui comportent des facilités sans doute excessives laissées aux personnels, ainsi que 12 jours d'indisponibilité liée au fonctionnement de l'établissement, à la formation et à des ruptures de charge entre chantiers. L'organisation du travail et la gestion des ressources humaines sont donc, pour le moins, largement perfectibles.
Le même décompte intègre en ,moyenne un reliquat de 7 jours de congés payés acquis par les ex- salariés de l' AFAN au titre de 2001. La possibilité a été offerte à ces agents d'étaler sur 2 ans le solde de leurs congés~ si bien qu'on. peut prévoir sur 2003 un reliquat de congés AFAN. Le nombre de jours de grève devrait encore reduire le nombre de jours travaillés en 2003. Des mesures drastiques sont donc nécessaires , au 2e semestre 2003, pour reconstituer des capacités de travail de l’INRAP en réduisant les jours d’indisponibilité et les ruptures de charge.
Les ruptures de charge entre chantiers, qui témoignent d'un défaut dans l'organisation du travail, se sont élevés en moyenne en 2002 à plus de 5 jours par ETP, soit plus d'une semaine de travail (cf. annexe 5). Même si ce chiffre ne peut être réduit à 0, des marges d'amélioration, là encore, existent.
Certains aménageurs ont indiqué à la mission qu'ils " avaient l'impression que les chantiers fonctionnaient à mi-temps ". Ce constat est partagé par un certain nombre de directeurs régionaux des affaires culturelles. Différents éléments peuvent contribuer à un tel jugement: le temps de travail est décompté depuis la résidence administrative si bien que, sur certains chantiers, les archéologues sont à pied d'œuvre du lundi après-midi au vendredi midi, voire au jeudi soir; l'application des 35 heures permet en effet de libérer un vendredi sur deux; les congés de maladie ne sont pas systématiquement remplacés.
La question de la productivité, même si elle est difficile à mesurer, est donc un enjeu central du redressement de l'établissement et de la restauration de son image auprès des aménageurs.
5 - Le recrutement de CDD devrait permettre de gérer la transition vers un modèle organisationnel plus adapté
Face au grand nombre de prescriptions et à la nécessité de réaliser les opérations commandées à l' AFAN, une saturation de la charge de travail est apparue dans la plupart des interrégions dès mi- 2002. Cette situation a conduit l'INRAP à recruter massivement des CDD à partir de juillet 2002 (Cf. graphique page 8 de l'annexe 5) : leur nombre est ainsi passé de moins de 200 ETP opérationnels en mai 2002 à près de 500 en décembre 2002, certains grands chantiers étant dépendants à 50%, ou plus, de CDD.
Le taux de charge est en effet très défavorable: il s'établit à 155% à mi-avril 2003, ce qui permet de mesurer le besoin en CDD, si rien n'est fait pour réduire le nombre d'opérations planifiées et les moyens humains affectés à celles-ci.
La place des CDD dans le dispositif est centrale, non parce que ces contractuels ont vocation à devenir des CDI mais parce que ce sont les seuls à pouvoir, dans le cadre actuel, assurer les commandes faites par l’Etat à l’INRAPsans accroître les effectifs permanents de cet établissement. La mission estime en outre que la productivité des CDD est vraisemblablement plus élevée que celle des CDI, sans toutefois pouvoir l'étayer de manière rigoureuse: il n'a pas été possible, en effet, d'établir un décompte distinct des jours travaillés par les seuls CDI et par les seuls CDD. Il n'en apparaît pas moins que certaines causes de non-travail n'existent pas pour les CDD, comme les soldes de congé AFAN, les ruptures de charges et une partie des jours d'indisponibilité, soit un " gain potentiel " de l'ordre de 12 à 20 jours ouvrables.
De plus, à la différence des CDI, les CDD ont, pour près de 60% d'entre eux, moins de 30 ans (cf. annexe 5), ce qui laisse augurer des personnels moins affectés par la pénibilité du travail.
Compte tenu de ces potentialités, et dans la perspective d'un blocage, voire d'une réduction du nombre de CDI, le recours à des CDD semble le moyen de gérer la transition vers d'autres formes organisationnelles. Cette transition ne saurait bien évidemment se prolonger au-delà de quelques années car le recours aux CDD est coûteux: à l'issue de leur contrat (d'au-moins 4 mois), les CDD bénéficient, en effet, d'une indemnité de chômage dégressive sur 3 ans. Cette indemnité est quasi exclusivement financée par 1'INRAP dans la mesure où les archéologues ne trouvent pratiquement jamais d'autres employeurs que 1'INRAP. Ces archéologues sont donc soit sous contrat avec l'INRAP quand ils travaillent, soit indemnisés par 1'INRAP quand ils ne travaillent pas.
Pour l'INRAP, ces indemnités représentent une charge élevée puisque leur montant est assez comparable à celui de la masse salariale des CDD : en 2003, dans l'hypothèse de 183 ETP annuels CDD, le total des salaires brut serait de l’ordre de 4M€ et les indemnités de chômage versées aux ex-CDD, de l’ordre de 3.4M€. A dépenses égales, il apparaît donc préférable d’employer les CDD, ou de les inciter à créer leur entreprise (Cf. partie IV) plutôt que e les indemniser.
En définitive, une augmentation (temporaire) du nombre de CDD, en accompagnement de la réduction de l'activité de l'INRAP et de celle de ses emplois permanents (CDI), qui apparaît gagnante en terme de productivité et de réactivité, permettrait de favoriser la transition vers un système plus décentralisé.
6 - Une dérive bureaucratique caractérise la mise en place de l'INRAP, qui n’a pas su (ou pu) unifier les pratiques de ses structures décentralisées.
L'AFAN était un regroupement extrêmement souple d'antennes régionales, très autonomes d'un point de vue opérationnel, qui recevaient leurs commandes directement des services déconcentrés de l'Etat (SRA) et avaient peu de liens avec le siège de l'AFAN.
La création de l’INRAP n’a pas modifié le comportement autonome de ces antennes décentralisées mais s’est traduite par des procédures de gestion budgétaires et comptables très centralisées, plaquées sur ces comportements. Il s'ensuit, d'une part, une lourdeur de gestion mal ressentie et critiquée dans nombre d'interrégions, d'autre part, de nombreux dysfonctionnements liés à l'absence de référentiel commun et à la pérennisation de pratiques hétérogènes.
Alors que le décret n° 2002-90 du 16 janvier 2002 avait prévu la possibilité d'instaurer des ordonnateurs secondaires par interrégion, avec délégation de pouvoirs, cette faculté - laissée à l'appréciation du directeur général - n'a pas été utilisée. Un succédané a été mis en place avec des ordonnateurs "délégués " qui ne disposent que d'une simple délégation de signature jusqu'à 45 000 € pour les commandes, marchés, contrats et tous actes de dépenses en général. Si le directeur interrégional reçoit bien notification de son budget, il n'en gère directement qu'une petite partie.
En l'absence d'ordonnateur et de comptable secondaires en interrégion, ce sont les services du siège qui assurent les engagements comptables, les mandatements et l'émission des titres de recettes. Le traitement des factures est complexe et lourd, ce qui explique, pour partie, la longueur des délais de paiement en 2002 et le mécontentement des fournisseurs: ainsi, le traitement des 25 500 mandats fournisseurs émis en 2002 n'était pas terminé en 2003. Cette centralisation apparaît tout à fait inappropriée quand on sait que 70% des mandats sont d’un montant inférieur à 500€ et représentent au total 3% de la dépense. Un circuit plus court, géré directement par les directions interrégionales, serait plus adapté.
Pour éviter un blocage du système, des dérogations aux règles de la comptabilité publique ont dû être consenties (avance de frais de fonctionnement aux responsables de chantiers et allègement du contrôle systématique des remboursements de frais de déplacement). Malgré ces éléments de souplesse, la procédure reste inutilement lourde et centralisée.
Et, surtout, la centralisation introduite avec la création de l’INRAP n’a pas modifié l’organisation existant antérieurement, n’a pas permis d’homogénéiser les pratiques des directions interrégionales et n’a pas cherché à créer des normes, garanties d’une utilisation optimale des moyens humains et budgétaires. L 'organisation de l' AFAN a été reprise telle quelle:
Cette hétérogénéité des pratiques entre interrégions se constate également dans le coût des opérations : le tableau ci-dessous présente les coûts minimum et maximum des diagnostics et des différents types de fouille. Même si des facteurs historiques ou géographiques expliquent pour partie l'origine des écarts de coûts, ceux-ci sont excessifs. ils semblent résulter d'une grande hétérogénéité, d'une part, des moyens humains affectés par les directeurs interrégionaux pour un type d'opération, d'autre part, des coûts de terrassement (cf. pièce jointe n° 3 en annexe 4), sans qu'on puisse déterminer si ces écarts traduisent des différentiels de prix de marché par région ou des capacités diverses de négociation, pérennisées ultérieurement.
Coûts en €/m2 | Minimum | Maximum | Moyenne-toutes Dir | Ecart entre mini et maxi |
Diagnostics | 0.24 (NP) | 1.1 (RAA) | 0.37 | 1 à 4.5 |
Fouilles stratifiées | 63.3 (RAA) | 268.4 (MED) | 111 | 1 à 4.2 |
Fouilles non stratifiées | 12.4 (NP) | 100.4 (GSO) | 13.8 | 1 à 2.6 |
Fouilles mixtes | 12.4 (NP) | 100.4 (GO) | 23.1 | 1 à 8 |
Toutes opérations | 0.5 (GO) | 1.65 (RAA) | 0.7 | 1 à 3.3 |
Ces écarts de coûts mettent en évidence l'absence de normes concernant l'étendue des sondages pour les diagnostics ou les moyens à mobiliser (matériels, hommes-jour...) par type d'opération.
La remontée au siège de 1'INRAP des projets d'intervention des dossiers de plus de 90.000 E a bien été mise en place mais, en pratique, il a semblé à la mission que ce dispositif d'information n'était pas exploité, ce qui rend le circuit inutile. En tout état de cause, les délais réglementaires pour répondre aux prescriptions des SRA étant courts, ils ne sont pas compatibles avec un visa centralisé, ce qui renvoie à l'exigence de normes. Un groupe de travail a ét récemment installé pour mettre en place des normes d’affectation des moyens humains opérationnels pour les diagnostics et les fouilles en milieu urbain. L’aboutissement, dans les meilleurs délais, des travaux de ce groupe de travail est une priorité : cet exercice permettra de mettre en évidence les régions en sureffectif et celles en sous-effectif, de manière à évaluer les corrections qu'il faudrait apporter à la répartition des emplois.
La superposition de procédures financières centralisées et de comportements autonomes est caractéristique d’une d "rive bureaucratique à laquelle il doit être mis fin. A cet effet, il convient d’accélérer le travail de production d’un référentiel commun des pratiques archéologiques et d’affectation des ressources humaines, de manière à ce que les pratiques des directions interrgionales , qui sont largement le fruit de l’héritage, puissent faire place à une plus grande responsabilisation. Dès lors que ce référentiel est établi, la responsabilisation des interrégions peut passer par la mise en place d’ordonnateurs secondaires et l’attribution de budgets à gérer en propre. Cette évolution, nécessaire à l’objectif de territorialisation, pourrait être conduite progressivement avec un premier groupe d’interrégions.
III - L'ASSIMILATION DES TRAVAUX D'ARCHEOLOGIE PREVENTIVE A DE LA RECHERCHE SCIENTIFIFIQUE CORRESPOND DAVANTAGE A DES ASPIRATIONS INDIVIDUELLES ET A DES DECLARATIONS DE PRINCIPE QU'A LA REALITE DES CHOSES
L'article 1er de la loi du 17 janvier 2001 situe sans ambiguïté l'archéologie préventive dans le champ de la recherche puisque celle-ci est "régie par les principes applicables à toute recherche scientifique ".
Cette définition se veut une réponse à l'une des principales critiques adressées à l'AFAN: les matériaux et données recueillis au cours des opérations d'archéologie préventive étaient insuffisamment exploités et peu de place était accordée à la publication. Aussi, l'article 4 de la loi précitée précise-t-il expressément que, parmi ses missions, l'INRAP assuré l'exploitation scientifique de ses activités et la diffusion de ses résultats. Cet objectif est-il atteint?
1 - Si on se réfère aux textes. l'organisation de l'INRAP accorde la première place à la recherche. en allant vraisemblablement au-delà de ce que la loi du 17 janvier 2001 avait envisagé.
C'est le décret n° 2002/90 du 16 janvier 2002, pris en application de la loi du 17 janvier 2001, qui transforme "l'établissement public national" prévu par la loi en un " institut de recherche ". Par ce même décret, le choix du président doit être effectué parmi les personnalités ayant une compétence dans le domaine de l'archéologie, alors que la loi ne pose aucune condition de compétence à ce recrutement. De plus, ce décret renforce les pouvoirs du président du conseil d'administration puisque ce dernier cumule cette fonction avec la présidence du conseil scientifique. Enfin, le tiers des membres du conseil d'administration relève d'une manière ou d'une autre des secteurs de la recherche et du monde universitaire.
Dans le même sens, une filière hiérarchique, qui est justifiée par la priorité accordée à la recherche, double la filière administrative: elle repose sur une direction scientifique et technique dont le directeur, hiérarchiquement dépendant du directeur général, peut être, curieusement, nommé contre son avis puisque l'avis conforme du président est requis (art. 12 du décret) ainsi que sur la présence d'un adjoint scientifique et technique dans chaque interrégion. Le rôle du président, en fonction bien que le conseil d'administration ne soit pas encore réuni, met en évidence le double système de commandement, avec une filière scientifique et de recherche d'un côté, une filière administrative dirigée par le directeur général de l'autre.
2 - En pratique. les réalisations en matière de recherche ne sont pas convaincantes. la situation n'ayant guère évolué depuis l'AFAN. autrement que dans l'affichage organisationnel et les intentions.
Les responsabilités exercées et les compétences des personnels, ainsi que les retards dans la mise en œuvre de certains dispositifs, ne permettent pas de qualifier aujourd'hui 1'INRAP d'établissement de recherche (Cf. annexe 7) :
-le conseil scientifique n'est pas encore constitué, même si le président en réunit des membres de manière informelle. Leur liste mérite d'ailleurs réflexion: près de la moitié de ses membres sont des personnels de l'INRAP ou des services régionaux de l'archéologie. Un tel conseil ne devrait-il pas être plus indépendant des services opérationnels qui s'occupent d'archéologie préventive et comporter des personnalités extérieures aux compétences scientifiques éminentes?
-la direction scientifique et technique, chargée de veiller à la dimension scientifique et de recherche, n'a eu jusqu'à une période récente que deux agents, le directeur et son adjoint, alors que 20 personnes sont prévues ;
~ les responsables d'opération qui sont chargés de "l'encadrement scientifique des chantiers se recrutent, pour plus d'un tiers, dans une filière de technicien, ne relevant pas de la recherche. Bien plus, ils ne sont issus qu'à hauteur de 16% de la catégorie 5 (ingénieur, chargé de recherche), normalement destinée à cet encadrement;
-alors que les textes prévoient une hiérarchisation très poussée des catégories d'emploi en fonction des qualifications et des diplômes, la possibilité de pourvoir des emplois par voie de promotion interne à hauteur de 50% des emplois, voire de 70 %. sur proposition de la commission de recrutement prévue par décret, a abouti à pourvoir par promotion interne une grande partie des postes de catégorie 5 et 4 - ceux qui ont la qualification de recherche -et à réserver les recrutements extérieurs aux postes de technicien des catégories 3 et 2, de moindre niveau de qualification. Ainsi, le cadre réglementaire, apparemment très exigeant sur le .niveau de diplôme requis par souci scientifique, permet aussi, à l'issue d'une mécanique très complexe de commissions de recrutements désignées après avis du comité technique paritaire, de favoriser la promotion interne en dérogeant aux conditions de diplôme et en validant les acquis. Même s'il est légitime de tenir compte de l'expérience des candidats et des points de vue exprimés par la représentation syndicale, la lisibilité du dispositif de recrutement en est perturbée;
-les agents qui ont posé leur candidature à une unité mixte de recherche (UMR) sont au nombre de 113, soit 8% de l'ensemble du personnel. Cette proportion, qui s'explique en partie par la complexité du système contractuel, situe sans doute bien la place effectivement accordée à la recherche pour l'ensemble des agents ;
-la rédaction du rapport de fouilles est partie intégrante de l'opération de fouille. Or, actuellement la remise de ces rapports ne fait pas l'objet de suivi. La direction générale de 1'INRAP estime que, sur l'ensemble des prescriptions reçues (suivies ou non d'opérations), ce rapport devrait exister pour le tiers des diagnostics et pour un chiffre extrêmement faible pour les fouilles.
3 - La mission a le sentiment que les disponibilités en temps et en financements autorisées par le budget scientifique" sont. pour une part significative. trop éloignées de la finalité des chantiers.
Le " budget scientifique " consiste en du temps/agent (5% soit 83 ETP) soustrait aux activités de terrain ou d'encadrement administratif pour permettre la publication ou la valorisation des résultats des opérations et contribuer à enrichir le contenu scientifique des activités de l'INRAP. En pratique, les projets à vocation personnelle (fouilles programmées, missions à l'étranger, UMR) qui intéressent un certain nombre d'archéologues des catégories 5 et 4, sans doute un peu plus d'une centaine, absorbent la majeure partie du " budget scientifique " alors que ces travaux personnels sont souvent sans lien direct avec les opérations d'archéologie préventive sur le territoire national. Par contre, les progrès en matière de publications sont difficiles à apprécier faute de suivi d'une part, et de termes de comparaison avec l'AFAN, d'autre part.
Tout se passe comme si le Ministère en charge de la recherche ne dégageant pas les crédits et postes nécessaires, soit par difficulté à assurer les redéploiements nécessaires, soit parce que l’archéologie préventive ne constitue pas une priorité de premier rang, l’INRAP intervenait, à titre supplétif, pour les chercheurs de cet établissement, pour pallier l’absence de responsabilité effective prise jusqu’à présent par ce ministère.
Au demeurant, compte tenu de l'investissement en temps et en financements, on est en droit de s'interroger sur l’intérêt pour l'INRAP de se départir ainsi, notamment dans la: période de crise actuelle, d'une partie de son potentiel de travail, le plus qualifié: le temps réservé à leurs travaux de recherche par une partie des archéologues de catégorie 5 et 4 fait défaut à l'encadrement des opérations d'archéologie préventive et explique qu'une partie significative des responsables d'opérations se recrute désormais soit parmi du personnel moins qualifié de l'INRAP, soit par convention à l'extérieur, notamment avec du personnel des collectivités territoriales. Il appartient à la direction de l'établissement de mettre un terme à cette pratique et de restaurer les personnels de catégorie 4 et 5 dans leur fonction première d'encadrement des activités de chantier.
Pour la mission, les opérations susceptibles d'être financées sur le budget scientifique de l'INRAP devraient être limitées aux seules opérations de valorisation des opérations d'archéologie préventive conduites par l'établissement, valorisation auprès du grand public, trop souvent oubliée, ou valorisation au sein d'une unité de recherche. Ce budget scientifique s'en trouverait significativement dégonflé.
Par ailleurs, la participation à des colloques (Cf. annexe 7-3) ne devrait être admise que si l'objet est en rapport direct avec le contenu d'une opération de chantier ou entre dans un plan de formation professionnelle.
S'agissant des fouilles programmées, des missions à l'étranger ou de la participation à des recherches universitaires, la mission considère que leur financement ne relève pas de l'INRAP, ni donc de la redevance versée à cet établissement par les aménageurs. Si des chercheurs ont besoin de temps, ce qui bien évidemment ne saurait leur être refusé, cette mise à disposition doit être compensée, d’une façon ou d’une autre, pour ne pas peser sur le budget de l’INRAP. Les activités de recherche sont habituellement financées en France sur les ressources du budget de l’Etat dont dispose le ministère en charge de la recherche. Or, à ce jour, ce ministère ne verse aucune subvention à l’INRAP.
4 - Des solutions doivent être recherchées pour permettre la prise en charge des activités de recherche de ceux des agents de l'établissement qui y consacrent une partie de leur temps.
Ces solutions passent soit par une subvention à l'INRAP, dès lors que ces activités s'inscrivent dans les priorités du ministère de la recherche, soit par la mise à disposition de postes dans les structures de recherche pour accueillir des personnels de l'INRAP. La mission ne pouvant ignorer la difficulté, pour ce ministère, de dégager les moyens de subventionner de manière pérenne des chercheurs de l 'INRAP, une démarche de partenariat, équilibrée pour les deux partenaires pourrait être recherchée: dès lors qu'un réseau d'UMR en archéologie plus dense serait progressivement créé par le ministère de la recherche, des personnels de l 'INRAP pourraient y être détachés pour une durée limitée de manière à achever ou approfondir leurs recherches; cette démarche pourrait également favoriser l'attribution de crédits de temps et des passerelles vers des postes en université et au CNRS. En contrepartie, l'INRAP pourrait accueillir des stagiaires à l'issue de leur cycle de formation universitaire en archéologie.
Pour autant cette démarche ,e saurait être engagée que si le ministère en charge de la recherche – et non les seuls chercheurs en archéologie – considère expressément que l’archéologie fait partie de ses priorités et, en conséquence met à disposition des chercheurs les financements et les postes en UMR correspondant à cette priorité.
serait temps de sortir de la situation actuelle dans laquelle l'INRAP dégage sur les crédits publics qui lui sont attribués les moyens de financer une politique de recherche sans que les ministères de tutelle s'assurent que celle -ci s'inscrit dans leurs priorités. L'exemple des actions collectives de recherche (ACR) est, à cet égard, instructif (Cf. annexe 7 -7).
5 – Compte tenu de la faiblesse de l'activité de recherche de l'INRAP faut-il le regretter et considérer qu’il faudrait consacrer davantage de moyens à la recherche ou faut-il admettre que l'ancrage " recherche scientifique " n'est pas nécessairement le mieux adapté aux modalités opérationnelles de l'archéologie préventive ?
En premier lieu, la mission, qui n'a bien entendu aucune compétence scientifique, considère qu'il ne serait pas inutile de clarifier les concepts et le vocabulaire. Elle a le sentiment que, très souvent, il y a confusion entre la fonction "technique" assurée par l'INRAP et les qualifications " scientifique " ou "activité de recherche ". A ses yeux, les opérations d'archéologie préventive nécessitent la connaissance et la mise en œuvre de savoir -faire et techniques très élaborés, ce qui implique un bon niveau de formation des personnels, une expérience et l'encadrement par des spécialistes et des scientifiques. Ce sont essentiellement les matériaux et données issus des fouilles qui ont vocation à nourrir la recherche et à déboucher sur une exploitation scientifique.
Les opérations d'archéologie préventive conduites par l'INRAP sont moins des opérations de recherche à proprement parler que des processus techniques qui s'inscrivent, en amont comme en aval, dans une démarche scientifique: en amont, les conservateurs des SRA qui prescrivent ces opérations et les responsables qui les organisent ne peuvent le faire que parce qu'ils disposent des connaissances et compétences scientifiques; en aval, les données et matériaux issus des fouilles ne peuvent être exploités que dans le cadre d'équipes de recherche à laquelle doit, bien entendu, contribuer un responsable d'opération. La vocation de l'INRAP est de mettre en œuvre les techniques très élaborées qui permettent ensuite l'exploitation scientifique et la recherche. Ainsi, si l'INRAP ne peut être qualifié d'institut de recherche, le niveau de compétence de ses agents est le garant d'une exploitation ultérieure en vue de la recherche.
En définitive, pour la mission, le balancier est allé sans doute trop loin dans l’identification à la recherhce des opérations conduites par l’INRAP, en oubliant que l’archéologie préventive s’inscrit aussi dans le cadre d’opérations d’aménagement, constitue une activité économique qui procure des emplois et des débouchés et participe à la préservation et à l’enrichissement du patrimoine. La question de la recherche à l’INRAP se ramène, pour l’essentiel, à celle des agents de cet établissement qui conduisent par ailleurs des activités de recherche et qui souhaitent disposer de temps pour cela.
IV - L'AVENIR DE L'ARCHEOLOGIE PREVENTIVE PASSE PAR UNE PLUS GRANDE DIVERSITE D'ACTEURS ET UNE REFONDATION AU PLUS PRES DES TERRITOIRES
Le mécontentement qui s'est développé, courant 2002 et 2003, à propos des coûts et des délais a mis en évidence les rigidités introduites par la situation de monopole de l'INRAP. En réaction, les aménageurs, et surtout, des parlementaires ont considéré que le recours à la concurrence pouvait être un moyen d'introduire davantage de souplesse dans le dispositif, même si le marché de l'archéologie restait largement à construire.
En tout état de cause, pour la mission, l’objectif d’ouverture à un plus grand nombre d’opérateurs est essentiel parce qu’il constitue le moyen de restaurer une souplesse et une réactivité d’intervention, qui existaient avant la création de l’INRAP, et dont la perte est regrettée par un grand nombre d’interlocuteurs, notamment parmi les aménageurs.
Le projet de loi actuellement devant le Parlement maintient un régime de droits exclusifs pour les diagnostics au profit de l 'INRAP et, dans certaines conditions, de collectivités territoriales volontaires, ces opérations étant financées sur le produit de la redevance d'archéologie. Par contre, le monopole de l'INRAP disparaît pour les fouilles: les aménageurs deviennent maîtres d'ouvrage des opérations de fouilles qui leur sont prescrites et peuvent contracter avec n'importe quel opérateur agréé. En pratique, .-les aménageurs n'auront pendant longtemps d'autre choix que de recourir à l' INRAP, si bien que l'ouverture à d'autres opérateurs pourrait rester lettre morte.
1 - L'objectif d'une plus grande pluralité d'acteurs. oui doit s'appuyer sur les réseaux existants peut prendre du temps à se concrétiser. si rien n'est fait pour l'encourager.
Si les pouvoirs publics souhaitent ouvrir1es opérations d'archéologie préventive à d’autres acteurs que l’INRAP, comme l’envisage le projet de loi en cours de discussion, une politique claire reposant sur des mesures incitatives relayées par les services déconcentrés de l’Etat devrait être mise en œuvre et rapidement rendue publique par l’Etat.
-les incitations existant en matière de création ou de développement d'activités devraient pouvoir être mobilisées au profit des archéologues désireux de s'inscrire dans cet objectif. Les mécanismes d'aide aux demandeurs d'emplois créateurs d'entreprises pourraient être sollicités (dispositif ACCRE, exonération de cotisations sociales...). Les financements consacrés par l'INRAP à l'indemnisation des archéologues chômeurs sont très importants (3,4 M E en prévisionnel 2003) : ces financements publics seraient mieux utilisés s'ils permettaient la création d'emplois durables. En outre, rien ne s'oppose à ce que l'institut pour le financement du cinéma et des industries culturelles (IFCIC) puisse intervenir auprès d'archéologues qui désireraient créer leur entreprise ;
-cet objectif d'ouverture ne saurait se concrétiser s'il n'est pas partagé par les services déconcentrés de l'Etat. Les SRA devraient être, sur le terrain, porteurs de cette orientation par une répartition appropriée et progressive des prescriptions entre tous les acteurs, en fonction de leurs compétences et de leurs spécialité. Or, les contacts de la mission avec certains SRA montrent une réticence face à cet objectif, voire une certaine hostilité aux structures autres que l'INRAP, l'ouverture aux services d'archéologie des collectivités territoriales apparaissant parfois subie. Une action vigoureuse de mobilisation et d'encadrement des SRA, conduite au plus haut niveau du ministère de la culture et de la communication, est là encore nécessaire pour que ces services de l'Etat soient, sur le terrain, le relais des décisions du Parlement et du gouvernement.
Enfin, il est apparu à la mission que le projet de loi pouvait apparaître un peu frileux au regard de l’objectif d’ouverture à uyn pluralité d’acteurs et recelait des marges d’amélioration : ainsi, son article 2 ne prévoit pas d’ouvrir la réalisation des diagnostics à des organismes autres que l’INRAP ou des collectivités territoriales. Or, les entités associatives ou constituées en société sont souples et réactives. Elles peuvent, si nécessaire, rapidement embaucher des CDD, ce qui peut convenir à des étudiants ou à de jeunes archéologues. Elles apparaissent particulièrement adaptées à des diagnostics rapides que l’INRAP ne peut pas faire ou sur des créneaux très spécialisés pour lesquels l’INRAP n’a pas encore démontré sa capacité à intervenir, comme l’archéologie du bâti. S’il apparaissait difficile, à ce stade, d’ouvrir cette possibilité par la loi au-delà de la sphère publique, le recours à la sous-traitance pourrait, dans un premier temps être recommandé.
2 - Les collectivités territoriales peuvent trouver dans le projet de loi en cours de discussion des opportunités de développement de services d’archéologie alors que, jusqu’à présent, elles sont apparues assez peu intéressées par cette activité.
Les services d'archéologie des collectivités territoriales, au nombre d'une centaine (C f. annexe 6, p.j. n°6) sont de taille réduite, souvent constitués d'une seule personne, le conservateur, assisté ou non de personnel technique. lis assurent le plus souvent la conservation d'un musée ou d'un élément de patrimoine et, sauf exceptions, interviennent assez peu dans les opérations d'archéologie préventive.
Il a semblé à la mission que, jusqu'à présent, les collectivités territoriales n'avaient pas manifesté, sauf exception, un très grand intérêt pour ces opérations. De plus, la complexité des procédures et la longueur des délais pour les faire aboutir ont pu aussi en freiner le développement, d'autant qu'une délibération de l'assemblée délibérante est nécessaire:
-il faut déjà que le service soit agréé par l'Etat. A mi-avril 2003, le quart environ des services territoriaux avaient reçu cet agrément. Deux refus étaient motivés par l'absence d'un conservateur titulaire;
-pour intervenir dans une opération d'archéologie préventive, le service archéologique territorial agréé doit être lié par convention avec 1'INRAP (Cf. annexe 6, p.j. n°7). A ce jour, les conventions sont peu nombreuses: à mi-avril 2003, une convention d'opération (Calvados) et deux accords cadre (Dordogne et Douaisis) avaient été conclus de façon certaine. Un certain nombre de projets de convention d'opération ou de convention cadre (nécessitant ensuite des conventions particulières) étaient à l'étude depuis plusieurs mois, parfois près d'une année.
Par contre, une collaboration avec les archéologues de collectivités territoriales s'est développée au travers de conventions de collaboration permettant à des archéologues de collectivités territoriales d'être désignés responsables des opérations menées par l'INRAP (Cf. annexe 6, pièce jointe n°8). Cette collaboration constitue une reconnaissance de facto de la qualification de ces archéologues territoriaux: 38 conventions avaient été signées, dont 31 avec des services communaux ou départementaux. Il faut remarquer que l' essentiel de ces conventions a été signé avec deux interrégions, Centre-Ile-de-France et Nord-Picardie. Même si les services archéologiques des collectivités territoriales ne sont pas également répartis sur toute la France, les relations conflictuelles qui existent dans certains cas avec les SRA ou les interrégions peuvent expliquer l'absence de collaboration.
Le projet de loi en cours de discussion, qui traite les services archéologiques des collectivités locales à peu près sur le même plan que l'INRAP, est susceptible de donner à ces services l'occasion de prendre toute leur place dans l'archéologie préventive. Les nouvelles dispositions financières pourraient notamment permettre "d'autofinancer" des services d'archéologie, ce qui n'était pas le. cas jusqu'à présent. Certaines collectivités territoriales, avec la dynamique nouvelle créée par les communautés d'agglomération, pourraient trouver intérêt à développer de tels services, de manière notamment à mieux maîtriser leurs espaces à aménager et à pouvoir valoriser auprès du grand public le. résultat des fouilles. --
A cet effet, la mission formule deux recommandations :
3 - L'ouverture à la concurrence des opérations de fouilles préventives nécessite quelques précautions.
Dans le dispositif prévu par le projet de loi en cours de discussion, la maîtrise d'ouvrage des fouilles appartient à l'aménageur qui, théoriquement, choisit l'opérateur, librement ou dans le respect du code des marchés publics s'il s'agit d'un aménageur public. L'opérateur est rémunéré au moyen d'un prix fixé par accord avec l'aménageur. En pratique, ce dispositif restera largement théorique au moins dans les premières années, l'INRAP restant l'opérateur quasi exclusif. fi apparaît néanmoins utile de préfigurer cette ouverture progressive à d'autres opérateurs.
L 'INRAP doit se mettre en situation de proposer ses services en matière de fouilles préventives sur un marché à vocation concurrentielle. même si cette concurrence est encore peu développée. A la différence du régime de financement issu de la loi du 17 janvier 200 l, l'établissement aura la possibilité de fixer son prix en fonction du coût de l'opération. A cet effet, il doit connaître son prix de revient et inclure dans le prix de la prestation de fouille, ses coûts directs et indirects (structure, recherche..). L 'INRAP ne dispose pas actuellement des éléments nécessaires, la comptabilité analytique notamment ne le permettent pas (Cf. partie II et note particulière du 10 juin 2003 sur la nouvelle redevance). Un effort très important doit donc être réalisé par l’INRAP,d’ici la date de mise en œuvre du projet de loi, pour disposer d’une connaissance précise de ses coûts, et non plus seulement de prévisions ou de valorisations moyennes, et améliorer en ce sens ses circuits d’information et ses outils informatiques.
Dans ce délai, pour se mettre en conformité (CF. jurisprudence du CE, société JL Bernard consultants) avecles exigences de l’égal accès aux marchés publics te le principe de liberté de la concurrence, l’INRAP doi organiser se comptabilité et ses procédures budgétaires de manière à distinguer, d'un côté, les activités financées sur la redevance, de l'autre, les activités de fouilles financées au moyen d'un prix et assujetties à la TVA. Dans le même sens, les prorata de taxe sur les salaires doivent être recalculés pour éviter de payer un montant excessif de taxe sur les salaires lors de la mise en œuvre du nouveau système.
Cette réorganisation qui ne devrait pas poser de prob1ème de principe, puisque .1 'INRAPa encore l'expérience de l' AFAN dont le financement reposait sur un prix - ne va pas de soi, compte tenu des difficultés rencontrées par les services budgétaire et comptable. C’est la raison pour laquelle il serait utile de donner à l’INRAP le temps nécessaire à cette réorganisation et de faciliter cette opération en faisant coïncider la mise en œuvre du nouveau système de financement avec l’exercice 2004. Le recours à un oncsultant pourrait, là encore, constituer un appui décisif.
Pour autant, même si les incitations recommandées au 1er paragraphe pour favoriser une plus grande pluralité d'opérateurs sont mises en œuvre, la question de la concurrence restera assez théorique pendant quelques années. Le marché ne pouvant assurer une bonne régulation des prix, les aménageurs devront être particulièrement vigilants dans la négociation des contrats. Les tutelles devront également s’assurer que le prix demandé par l’INRAP reste raisonnable et qu’il n’est pas l’occasion de financer, de manière excessive, les coûts de structure et le budget scientifique.
La qualification des opérations de fouille, au regard du droit communautaire et du code des marchés publics, devrait être précisée de manière à éclairer les aménageurs publics qui devront appliquer rapidement les dispositions envisagées par le projet de loi. Selon que les opérations d'archéologie préventive sont des services (culturels) ou des travaux, les dispositions applicables ne sont pas les mêmes: si ce sont des travaux, les opérations sont soumises à consultation au-delà d'un seuil, qui pourrait être modifié dans un proche avenir; si ce sont des services, la procédure particulière prévue à l'article 30 du CMP doit pouvoir s'appliquer.
Il est vraisemblable que les opérations d’archéologie préventive sont des services et non des travaux au sens de la directive communautaire sur les travaux (93-37). Cette qualification, si elle était confirmée, serait de nature à rassurer les aménageurs publics qui craignent que les dispositions prévues par le projet de loi se traduisent par un allongement supplémentaire des délais de libération des terrains, suite à procédure formelle de consultation. Une demande d’avis à la direction des affaires juridiques du ministère des finances pourrait aider à clarifier cette qualification. Au demeurant, il reste souhaitable de procéder à une consultation, ne serait-ce que pour tenter de peser sur les prix qio pourraient être proposés par l’INRAP.
Enfin, des bureaux d'étude spécialisés pourraient se constituer pour aider les aménageurs à négocier avec des opérateurs, à rédiger les contrats et à suivre le déroulement de ces opérations pour leur compte. De tels bureaux d’étude, indépendants des opérateurs et des grands groupes du BTP, pourraient constituer des débouchés pour les archéologues ou des CDD créant leur entreprise (Cf. paragraphe 1 de la partie IV)
En définitive, les dispositions prévues par le projet de loi en cours de discussion devraient réduire la portée des droits exclusifs dont dispose l'INRAP par la loi du 17 janvier 2001. Vont dans ce sens la place plus importante accordée aux services archéologiques des collectivités territoriales ou la reconnaissance de la maîtrise d'ouvrage des fouilles aux aménageurs. Ces objectifs ne seront réellement mis en œuvre qu'avec, dans un premier temps, une forte implication de l'Etat qui doit être le garant de l'ouverture des opérations d'archéologie préventive à un plus grand nombre d'acteurs. Il est à craindre qu’une partie des SRA soit mal à l’aise ou s’implique trop peu dans ce domaine. Aussi, la direction de l’architecture et du patrimoine devrait-elle recevoir la mission d’élaborer, concomitamment à la mise en œuvre du projet de loi, une " feuille de route " lui permettant de piloter cette ouverture auprès des centres de recherche, des collectivités territoriales, des associations et entreprises existantes, des archéologues souhaitant devenir opérateur ou créer un bureau d’étude.
4 - L'Etat doit se mettre en situation de préparer les évolutions à venir
Dès sa note d'étape du 4 avril 2003, la mission considérait que la sortie de crise de l'archéologie préventive passait par deux axes stratégiques :
Pour autant, ce projet de loi ne remet pas en cause certains des choix de la loi du 17 janvier 2001, principalement sur deux points:
S'agissant de la séparation entre l'Etat prescripteur et l' opérateur en charge des diagnostics, la mission s'interroge sur ce qui pourrait justifier, à terme, la pérennisation d'un établissement public administratif: en effet, si les fouilles sont confiées à d'autres opérateurs, de plus en plus nombreux dans les années à venir, et si les activités de recherche restent aussi peu concluantes (Cf. partie III), le domaine propre de l'INRAP se limite aux diagnostics. Or, souvent, de petites structures associatives ou de petites sociétés, plus flexibles et plus réactives, sont mieux placées que l'INRAP car elles peuvent se mobiliser plus rapidement sur des diagnostics urgents ou des opérations de moindre envergure, et à un coût moindre. En même temps, pour certaines opérations, le bon sens pourrait conduire à restituer aux conservateurs certains diagnostics qui ne demandent que des sondages ou des surveillances de travaux d'aménagement, comme certains conservateurs des SRA l~ pratiquaient auparavant ou le pratiquent encore en dépit de la loi. Ainsi, pourrait-on éviter des procédures inutilement lourdes de transmission à l 'INRAP de prescription de diagnostic. Dans ces conditions, la mission se demande si le maintien d'un établissement public national pour traiter de droits exclusifs (partagés avec des collectivités locales) en matière de diagnostic pourrait encore se justifier et s'il ne conviendrait pas d'envisager de restituer tout ou partie des diagnostics aux SRA, l'exécution pouvant en être sous-traitée.
Dans cette perspective, la question d'un transfert aux collectivités territoriales volontaires d'une compétence plus globale en matière de prescription / prospection pourrait alors se poser, même si, dans ce cas, des dispositions devraient être prises pour éviter qu'une collectivité territoriale effectue le diagnostic (ou la fouille) si elle est en même temps aménageur.
S'agissant de l'INRAP et indépendamment de la question des diagnostics, .le fonctionnement de cet établissement public national n'a pas démontré, à ce jour, que ce choix organisationnel était le plus pertinent.
Dès lors que les directions interrégionales retrouveraient davantage d’autonomie, avec notamment la mise en place d’un ordonnateur secondaire, elles pourraient constituer le point d’ancrage pour une territorialisation progressive. Une des formules qui pourraient être envisagées est celle de l’évolution de l’interrégion, pour tout ou partie, vers un établissement public de coopération culturelle (EPCC), en application de la loi du 4 janvier 2002 : cette structure, qui permet d'associer ou non l'Etat à des collectivités territoriales pour la gestion d'un service public à caractère culturel, pourrait apparaître particulièrement appropriée à la gestion des opérations d'archéologie préventive d'autant qu'elle présente l'avantage de pouvoir être créée sous la forme industrielle et commerciale. La circulaire d'application du 18 avril 2003 prévoit d'ores et déjà des applications dans le secteur du patrimoine (gestion de fonds d'archive, activités d'inventaire de monuments, conduite d'opérations de travaux sur monuments historiques).
Cette objectif de territorialisation préventive pourrait constituer le fil conducteur d’une réflexion à conduire en accompagnement de la remise au travail de l’INRAP, dans le contexte des nouvelles dispositions prévues par le projet de loi en cours de discussion. Son contenu précis et sa faisabilité juridique et politique devront être expertisés, en particulier sur le partage des compétences et des responsabilités entre l'Etat et ces EPCC, sur le format optimal de ces établissements ou encore sur les conditions de transfert des personnels.
La réflexion doit rester ouverte car, à ce stade, il est difficile de prévoir -et donc de recommander -la place qui devrait être occupée par le secteur public, collectivités territoriales et structures de recherche, et celle occupée par des opérateurs privés: le secteur public local pourrait ou non être amené à reprendre les compétences de définition de la carte archéologique et de prescription actuellement exercées par l'Etat, le secteur privé pouvant prendre un~ part, directement ou par sous-traitance, des opérations proprement dites d'archéologie préventive ou intervenir comme conseil des aménageurs.
Ces perspectives, si elle devaient être retenues à un horizon de moyen terme, devraient guider les décisions à prendre à court terme. Ainsi, par exemple, il devrait être mis fin à la croissance des effectifs budgétaires de l'INRAP, en prévision d'un transfert d'activités vers les EPCC. Dans une perspective de territorialisation de l'archéologie préventive, la question de la délocalisation du siège ne devrait plus se poser: une telle opération risquerait en effet de confirmer le caractère durable d'un établissement dont les activités devraient au contraire se restreindre.
Pour conduire ces évolutions, la mission propose la mise en place, avant fin 2003, d’un comité pour la refondation territoriale de l’archéologie préventive, chargé d’observer la manière dont les différents partenaires utilisent les possibilités offertes par le projet de loi en cours de discussion, de veiller à l’objectif de territorialisation, de proposer des formules progressives ou expérimentales pour y parvenir, de favoriser la concertation et de piloter les études nécessaires. Ce comité alerterait , en tant que de besoin, les autorités de tutelle sur les arbitrages qui lui semblent nécessaires pour atteindre, à terme, cet objectif de territorialisation. Ce comité pourrait comprendre des parlementaires, des représentants des aménageurs et ds collectivités territoriales, des représentants de l’Etat (culture, finances, décentralisation, recherche) et de l’INRAP ainsi que des archéologues.
Un tel comité semble nécessaire pour relayer l'action des autorités de tutelle qui se sont, à ce jour, montré défaillantes dans le pilotage de la réforme issue de la loi du 17 janvier 2001. Ce pilotage devant devenir plus exigeant avec les réorientations proposées, un appui rapproché semble devoir lui être apporté.
V - LA SORTIE DE LA CRISE ACTUELLE ET LA RECHERCHE D'UN EQUILIBRE DE TRANSITION IMPOSENT UNE REMOBILISATION D'URGENCE DE L'INRAP
L'AFAN, simple agence de moyens, a été transformée en établissement de recherche avec la création de l 'INRAP. Du fait du mécontentement qui a accompagné cette évolution, de la faiblesse des activités scientifiques et de recherche ainsi que de la rareté des ressources financières, le moment est sans doute venu de recentrer le fonctionnement de l'établissement sur sa mission première. la réalisation de travaux archéologiques Préalables à des opérations d'aménagement. Cette activité implique la mobilisation de moyens humains et matériels, la maîtrise de savoirs-faire techniques, permettant d'organiser, dans les délais requis et au moindre coût, des chantiers de travaux. Ces contraintes opérationnelles sont, somme toute, peu différentes de celles d'une entreprise spécialisée du BTP. C'est d'ailleurs avec raison que l'INRAP cherche à recruter des cadres du BTP pour diriger les interrégions.
A court terme, cette réorientation est nécessaire, quelles que soient les orientations qui pourraient être retenues pour l'avenir. Elle l'est d'autant plus que, dans le cadre des dispositions prévues par le projet de loi en cours de discussion, l'INRAP devra, à côté d'autres candidats, se porter candidat à la réalisation de fouilles préventives et, à ce titre, s'engager sur des coûts et des délais. Cet engagement suppose une maîtrise de l'organisation de chantiers, qui n'a pas fait ses preuves jusqu'à présent.
Il ne faut pas attendre du projet de loi réformant le financement de l’archéologie préventive une réponse à l’ensemble des dysfonctionnements apparus au cours de la période qui vient de s’écouler.
Aussi, la maîtrise des activités de l'INRAP passe-t-elle par plusieurs axes de mobilisation.
1 - La remise en confiance des personnels
Après deux mois de grève et de mobilisation des personnels contre le projet de loi en cours d'examen, la remise au travail de 1'INRAP nécessite le retour à un climat social pacifié. Une démarche d'explication et de dédramatisation. des nouvelles dispositions, législatives, mobilisant l’ensemble de l’encadrement, devrait être conduite dès la rentrée de septembre 2003. L’appui d’un consultant , spécialisé dans les démarches de projet d'établissement, de mobilisation des personnels et d'appui aux directions générales " coaching ") apparaît indispensable, compte tenu de la faiblesse de l'encadrement et de l'absence de repère ou de culture d'établissement autre que le ressort " scientifique ".
2 - Le retour à une situation financière équilibrée
Le retour à un fonctionnement normal de l’établissement suppose l’adoption, sans délai, d’un budget pour 2003 (Cf. note particulière du 3 juin 2003 sur le budget 2003). L’existence d’un budget doit permettre de plafonner le total des dépenses et donc de limiter, autant que faire se peut, le montant du déficit alors que l'exécution par douzièmes provisoires comporte un risque de dérive non maîtrisée de ces dépenses. Elle doit aussi permettre de relancer rapidement l'activité de l'INRAP en faisant redémarrer certains chantiers par le recrutement d'archéologues en CDD. Après deux mois de grève, cette relance est particulièrement nécessaire. Dans sa note, la mission a proposé de construire le budget sur un total de dépenses de l'ordre de 105 M E, ce qui est compatible avec 1405 postes budgétaires pourvus en CD! et un peu plus de 180 CDD annuels. Un tel budget nécessite 27 à 28 M€ de subvention d'équilibre dont une partie, du point de vue de la mission, devrait être de la responsabilité du ministère en charge de la recherche.
Ce budget permet de réaliser 1750 opérations, en plus du reliquat d'opérations AFAN, soit un volume d'opérations très inférieur aux opérations en stock (Cf. annexe 8) : le nombre de prescriptions reçues entre février 2002 et avril 2003, ayant donné lieu à la signature d'une convention, s'élève à près de 2400, soit un écart de 650 opérations au 30 avril 2003.. Cet écart est susceptible d'être encore accru puisque les négociations en cours devraient aboutir à la mise au point de nouvelles conventions. Il est donc nécessaire d’ajuster sans délai le volume des activités à la capacité de travail permise par le budget. Dans la mesure où nombre de SRA ne semblaient pas pleinement convaincus de la nécessité de cet ajustement, la mission a recommandé, dans sa note précitée, un lissage des prescriptions en stock, sous l’autorité des préfets de région. Les abandons d'opération, qui peuvent être assez nombreux, devraient faciliter ce lissage. Cela étant, la diminution significative du nombre d'hommes -jours disponibles du fait du mouvement de grève du second trimestre 2003 rend l'exercice de lissage plus difficile et devrait conduire, dans un certain nombre de régions à un véritable " déstockage ".
En l'absence de cette opération -vérité, le risque est grand d'un report sans fin sur l'exercice suivant d'opérations à réaliser, avec un allongement des délais, générateur de mécontentement chez les opérateurs, et une pérennisation du déficit qui devrait être compensé par subvention.
Pour autant, l'adoption du budget initial 2003 et l'opération de lissage des prescriptions en stock ne sauraient suffire à garantir un déficit 2003 ne dépassant pas 28 M€. Trop de risques et d'incertitudes demeurent, sur le niveau des recettes ou le coût des opérations (Cf. partie II). C'est la raison pour laquelle la mission a recommandé de préparer, dès l'été 2003, une décision modificative du budget 2003. à adopter en tout début d'automne 2003 : celle-ci doit permettre d'intégrer le résultat du compte financier 2002, dès lors que l’engagement de produire ce compte pour fin août 2003 peut être tenu. Une vigilance toute particulière des tutelles sur le respect de ce calendrier est nécessaire, compte tenu des congés d’été. Le résultat d'exploitation 2002 devant être déficitaire, une subvention complémentaire à celle décidée pour le budget initial sera nécessaire.
Dans le dispositif financier actuel, le montant des redevances dépend des opérations réalisées: dès lors, l'opération de déstockage doit aussi permettre de recenser les opérations qui seront réellement exécutées en 2003 et donc d'ajuster, dans la décision modificative d'automne, les prévisions de recettes en conséquence. Une partie des prévisions de recettes figurant au budget 2003 sont en effet probablement des recettes fictives car elles correspondent à des opérations qui ne seront pas réalisées dans l'exercice.
Les exercices 2002 et 2003 seront déficitaires alors que le dispositif législatif et financier avait prévu des situations équilibrées, ne nécessitant pas de subvention publique. 40 M€ de subventions publiques au moins devront être mobilisées sur ces deux exercices. Le risque de voir admis le principe d'une subvention annuelle doit être pris au sérieux et vivement combattu. La direction générale de l'INRAP, en liaison avec ses tutelles, doit donc avoir comme objectif l'éradication. la plus rapide possible. du déficit structurel de l'établissement.
Les dispositions financières prévues par le projet de loi en cours d'examen vont dans ce sens: en effet, elle devraient favoriser une amélioration du niveau des recettes de l'INRAP, du fait, d'une part, d'un mécanisme de rémunération des fouilles par un prix qui devrait garantir une adéquation plus étroite avec le coût de la fouille (Cf. partie N, paragraphe 3), d'autre part, de la mise en place d'une redevance d'archéologie préventive. Dans sa note particulière du 10 juin 2003 sur cette redevance, la mission a considéré que le dispositif envisagé par le gouvernement dans son projet de loi initial (taxation à partir de 5000 m2) ne garantissait pas une marge de sécurité suffisante du rendement attendu. Aussi, a-t-elle recommandé la recherche d'un accroissement significatif du produit attendu d~ la redevance soit par l'abaissement du seuil de taxation (jusqu'à 1000 m2) soit par la suppression d'exonérations, coûteuses en terme d'assiette et de produit.
Quelle que soit la solution qui sera en définitive retenue par le Parlement, celle-ci ne devrait pas modifier de manière substantielle les conditions de l’équilibre financier 2003. Cela signifie que l’émission des titres de recette 2002 et 2003 doit être menée à son terme et que l’action en recouvrement doit être poursuivie sans délai, avec vigueur et célérité.
Pour autant , un effort accru de la maîtrise des dépenses pourrait contribuer à améliorer les conditions de l'équilibre de l'établissement. Le fonctionnement de l'INRAP s'est en effet mis en place avec l'idée que la loi du 17 janvier 2001 permettait" une certaine abondance de ressources ". Cette idée n'a pas résisté à la première année de fonctionnement. Par ailleurs, des avantages acquis par le personnel dans le cadre de la gestion privée de l'AFAN ont été conservés lors de la mise en place de l'établissement public.
Les charges de personnel représentant les deux tiers des dépenses, l'effort doit porter en priorité sur ce poste (cf. 2ème partie). A cet égard, la pérennisation du régime AFAN de prise en charge pour moitié par 1'INRAP des cotisations aux régimes particuliers d'assurance accident et de mutuelle maladie constitue un avantage acquis significatif pour les salariés et représente pour l 'INRAP une dépense annuelle de l'ordre d'l M€ (Cf. annexe 10).
Des marges de réduction des dépenses peuvent apparaître sur d'autres postes, comme les véhicules, les locaux ou les téléphones mobiles (Cf. annexe 10).
3 - L'organisation et le système de commandement doivent être remis à plat.
La mission a fait un double constat portant, l'un sur les carences du conseil d'administration, l'autre sur le dédoublement des structures d'autorité.
Le conseil d’administration ne s’est jamais réuni et n’a donc pas joué son rôle. Or, il est théoriquement chargé d'administrer l'établissement (article 4 de la loi du 17 janvier 2001). Même si l'article 30 du décret n° 2002-90 du 16 janvier 2002, pris pour l'application de la loi du 17 janvier 2001, " légalise " cette situation en prévoyant un mode d'administration provisoire, son prolongement, deux ans et demi après le vote de la loi précitée, est excessif. Dans la situation difficile qu'a traversé l'INRAP depuis sa création, un conseil d'administration aurait pu jouer un rôle utile par sa réflexion stratégique, la définition d'une politique ou l'animation de la structure, en dépit des critiques qui peuvent être faites sur sa composition. A défaut, la direction de l'établissement s'est trouvée isolée pour faire face aux difficultés rencontrées alors même que son organisation interne s'est avérée peu performante.
La création de l’INRAP s’est en effet traduite par ne double ligne hiérarchique, l’une à caractère administratif, l’autre à vocation scientifique, à l’origine de lourdeurs, de complexité et d’une dilution des responsabilités (Cf. organigrammes en annexe 4).
Cette organisation complexe et peu responsabilisante est, d.'une certaine manière, autorisée par le décret précité, puisque son article 5 précise que "le président de l'établissement, le conseil d'administration, le directeur général et le conseil scientifique assurent le fonctionnement de l'établissement ".
En particulier, le président du conseil d'administration et le directeur général, tous deux nommés selon la même procédure, détachés et rémunérés Ii un niveau élevé par l'établissement, se partagent la direction de l'établissement et pilotent, chacun, une partie de l'organigramme. Ainsi, pour s'en tenir à un seul exemple, c'est le président du conseil d'administration qui préside le comité technique paritaire et le comité d'hygiène et de sécurité alors que le directeur général est théoriquement chargé de " recruter, nommer et gérer le personnel ".
La mission considère que l’organisation et les structures de commandement de l’INRAP doivent être revues. A cet effet, il sera nécessaire de modifier le décret en CE n°2002-90 du 16 janvier 2002 pour notamment, mieux préciser les responsabilités de conseil d’administration, des conseils associés et de la direction générale.
S'agissant du conseil d'administration. dans le contexte de crise de l'archéologie préventive, le conseil devrait être plus précisément orienté sur la stratégie et la définition de politiques à moyen terme, sur la définition de normes plus que sur l'implication dans la gestion quotidienne. Son rôle pourrait être utilement précisé au regard de l'un des axes stratégiques dégagé par la mission, la réconciliation de l'aménagement du territoire et de l'archéologie préventive. Le conseil pourrait ainsi faciliter l'interface entre les aménageurs, les élus et les archéologues et aider au rapprochement des points de vue, quand cela est nécessaire.
En tout état de cause, le conseil scientifique ne devrait pas doublonner le conseil d'administration. Il serait préférable de faire évoluer le conseil scientifique vers un comité d'experts, détaché de toute tâche de gestion et de toute hiérarchie administrative, chargé de donner des avis au conseil d’administration. Sa composition devrait être revue pour accueillir davantage de personnalités extérieures aux compétences scientifiques reconnues. (Cf. partie III, paragraphe 2). Il serait légitime qu'il soit présidé par un archéologue de grand renom.
Dans le même sens, la mission a proposé (Cf. note particulière du 3 juin 2003) la création d'une commission spécialisée des finances. susceptible, en situation de crise et de déficit quasi structurel, d’éclairer le conseil et de soutenir les efforts des services. Il est en effet indispensable que le conseil d’administration, dès qu’il sera en fonction, ne se consacre pas seulement à l’activité scientifique de l’INRAP et de ses membres mais se préoccupe aussi des grands équilibres et des activités opérationnelles de l’établissement.
La mise en œuvre de ces orientations devrait conduire à modifier la composition de conseil pour y accroître la représentation des aménageurs et celle des collectivités territoriales. Dans ce contexte, son président devrait avoir une certaine hauteur de vue pour favoriser l'interface entre admInistrateurs d'horizons différents, se préoccuper du bon fonctionnement de l'établissement et de sa gestion et instaurer, si nécessaire, un dialogue équilibré avec les organisations syndicales.
Dans la difficile période de redressement qui s’ouvre, il est nécessaire de mettre fin dans les meilleurs délais à la dyarchie constituée par le président et le directeur général et de restaurer une unité de commandement dans le cadre d’un organigramme simplifié et optimisé. L’existence d’une direction scientifique, en lieu et place d’une direction des opérations n’a pas lieu d’être.
L’unité de direction peut être assurée selon l’un opu l’autre des deux modes de management en vigueur dans les établissements publics, soit par un PDG, présidant le conseil d’administration et dirigeant simultanément l’établissement, soit par un directeur général assurant la totalité des fonctions de commandement, distinct du président, dont le rôle est alors de présider le conseil d’administration. Dans l’un ou l’autre cas, un seul dirigeant devrait être détaché et rémunéré pour exercer la fonction de direction générale.
Le dirigeant qu’il soit PDG ou directeur général, devrait avoir autorité sur l’ensemble de la structure.
Le siège pourrait comprendre deux grandes directions, une direction des opérations, interlocuteur des directions interrégionales, et une direction des moyens (finances, ressources humaines). Le dirigeant devrait, bien entendu, avoir à ses côtés un conseiller scientifique de haut niveau. L'organisation des directions interrégionales devrait suivre la même réorganisation.
La mise en place des dispositions prévues par le projet de loi en cours de discussion devrait être l'occasion de procéder à la modification des structures de commandement et de désigner un conseil d'administration rénové. Celui -ci devrait être en place dès l'automne 2003.
4 - Le retour à une situation financière plus équilibrée et l'instauration d'une unité de commandement doivent permettre à l'INRAP de préparer les prochaines échéances.
S'agissant du budget 2004. qu'il faudra commencer à préparer dès septembre 2003, l'objectif devrait être de pouvoir le présenter au conseil d'administration en décembre 2003.
La question du total des dépenses devra être réglée suffisamment en amont par les tutelles, dès que seront disponibles le compte financier 2002 et un minimum d’informations sur les coûts d’opération. L’évolution, à terme, vers une territorialisation devrait conduire à réduire progressivement les activités de l’INRAP et donc le total des dépenses. Cette séquence (réduction, par exemple de 5M€ par an) doit cependant être confronté à la vitesse avec laquelle des opérations pourront être prises en charge par les collectivités territoriales et le secteur privé.
La question des effectifs en CDI se pose simultanément : la réduction d'activité devrait s'accompagner d'une réduction des effectifs. Une difficulté supplémentaire apparaît pour la préparation du budget 2004: en 2003, cet effectif devrait être fixé à 1405, une partie des personnels n'étant recrutés qu'au second semestre. La masse salariale correspondante ne permet donc pas de rémunérer 1405 CDI en année pleine. Pour 2004, cela signifie qu’une partie des départs devra, vraisemblablement, ne pas être remplacée. Si cette analyse est partagée, les arbitrages correspondants devraient être signifiés à l’INRAP avant la préparation du budget 2004 et d’éventuels recrutements.
L'INRAP doit être, dès l'automne 2003, en mesure d'appliquer. pour ce qui le concerne. les dispositions législatives en cours d'adoption par le Parlement. Ainsi, pour pouvoir présenter ses offres en matière de fouille, l'INRAP doit mettre en ordre sa comptabilité et ses procédures (Cf. Partie IV, paragraphe 3). S'agissant de la nouvelle redevance d'archéologie préventive, la mission a vivement recommandé (Cf. note du 10 juin 2003) de décharger l'INRAP des opérations de liquidation et de recouvrement. Les difficultés rencontrées par l'établissement, notamment par son service comptable, conduisent à écarter cette charge supplémentaire. Il est préférable de confier la gestion de la nouvelle taxe aux différents services compétents de l'Etat, au besoin contre rémunération.
L’amélioration du fonctionnement de l’INRAP passe par le transfert aux directions interrégionales de davantage de responsabilités, notamment au moyen de la désignation d’ordonnateurs secondaires et de l’attribution de budgets territorialisés. Cette orientation, très importante, préfigure pour l’avenir, la territorialisation de l’archéologie préventive et permet d’y préparer les personnels. Il semble difficile de réaliser cette étape dans toutes les interrégions dès 2004. Aussi, est-il nécessaire de préparer une expérimentation permettant à quelques directeurs interrégionaux de disposer d’un budget et d’être ordonnateur secondaire dès 2004.
Ce transfert de responsabilités suppose que l 'INRAP, en liaison avec les services de l'Etat, ait opéré un minimum de nonnalisation et d 'homogénéisation des moyens humains et matériels affectés aux différents types de chantiers. Les groupes de travail qui fonctionnent déjà sur ces sujets devraient avoir pour objectif d'aboutir pour fin 2003.
Enfin, les efforts qui sont demandés à l’INRAP n’auraient pas de sens si, dans le même temps, le pilotage par l’Etat ne franchit pas une étape décisive : une régulation des prescriptions au delà de l’opération immédiate de destockage qui a été recommandée, doit être effective dès la fin de l'année. Dès lors, les outils d’une programmation sélective et hiérarchisée doivent être rapidement mis au point.
SYNTHESE DES RECOMMANDATIONS
Ces recommandations s'ordonnent autour de trois temps:
-la remise au travail de 1'INRAP, qui constitue, après environ deux mois de grève, la priorité de très court terme;
-l'instauration d'un équilibre de transition qui passe par la remobilisation de 1'INRAP et un renforcement du pilotage par l'Etat;
-la préparation de la " refondation " de l'archéologie préventive par la territorialisation à venir, qui doit être amorcée dès maintenant pour faire mieux fonctionner ce qui existe, sans compromettre les capacités d'évolution.
Réussir la remise au travail de l'INRAP :
-appuyer la direction par un consultant extérieur pour restaurer un climat de confiance (mission de " coaching ") ;
-adopter sans délai le budget 2003 pour sortir de la gestion par douzièmes provisoires et permettre le recrutement de CDD supplémentaires et la relance de certains chantiers;
-préparer dès l'été 2003 une décision modificative permettant notamment de vérifier le montant des recettes prévisionnelles;
-assurer une régulation des prescriptions, sous l'égide des préfets de région, de manière à ajuster la charge de travail aux ressources disponibles au budget 2003 et à réduire le risque de dérive du déficit 2003 ;
-communiquer sur la remise au travail de l 'INRAP et le redémarrage des chantiers.
Instaurer un équilibre de transition pour l'archéologie préventive par la re-mobilisation de l'INRAP :
-corriger les dysfonctionnements dans la gestion de manière à aborder 2004 dans de meilleures conditions: audit de l'agence comptable et audit des processus informatiques;
-relancer le recouvrement des titres de recette émis en 2002 et 2003
-préparer la mise en œuvre des dispositions relatives aux fouilles (comptabilité, procédures...) prévues par le projet de loi en cours de discussion;
-refondre les organes de direction en assurant l'unité de commandement (ce qui nécessite la refonte du décret du 16 janvier 2002) ;
-valoriser les résultats de l'archéologie préventive auprès des aménageurs, des collectivités territoriales et du grand public;
par le renforcement du pilotage par l'Etat:
-établir une programmation annuelle (priorités chronologiques et thématiques, déclinaison régionale) et définir une politique de prescription;
-veiller tout particulièrement à encourager la pluralité d'opérateurs pour retrouver de la souplesse;
-faire de la carte archéologique une priorité à conduire dans une démarche de projet;
-mettre fin à la double tutelle exercée par deux directions du ministère de la culture et affirmer le rôle de chef de file de la direction de l'architecture et du patrimoine;
-clarifier les attentes de l'Etat en matière de recherche et en tirer les conséquences.
Se mettre en situation de" refonder " l'archéologie préventive var la territorialisation :
-installer un " comité pour la refondation territoriale de l'archéologie préventive" pour préparer la mise en œuvre de l'objectif de territorialisation, piloter les études nécessaires, expertiser les différentes formules, notamment celle de l'établissement public de coopération culturelle et alerter sur les arbitrages nécessaires;
-préparer la territorialisation à venir par une plus grande délégation de responsabilités aux directeurs interrégionaux (ordonnateurs secondaires.. .) ;
-établir un partenariat renforcé avec les collectivités territoriales en vue d'une implication croissante crans les opérations d'archéologie préventive;
-ouvrir davantage le conseil d'administration de 1'INRAP aux aménageurs et aux élus en vue de mieux concilier les contraintes de l'aménagement et celles de l'archéologie;
-en prévision de la clause de revoyure prévue par la loi, s'informer des évolutions intervenues chez nos voisins européens en matière d'archéologie préventive.
Anne Bolliet, Inspectrice générale des Finances
Sarah Bouquerel, Commissaire Contrôleur Des Assurances
Jacques Charpillon, Inspecteur général de l'Administration des Affaires culturelles
Gérard Charnier, Inspecteur général de l'Administration de l'Education nationale et de la Recherche
Paris, le 11 juillet 2003