Le Premier ministre,
Sur le rapport du garde des sceaux, ministre de la justice, et du ministre
de la culture,
Vu la directive 93/7 du Conseil
des Communautés européennes en date du 15 mars 1993 relative
à la restitution de biens culturels ayant quitté illicitement
le territoire d'un Etat membre;
Vu le code civil;
Vu le nouveau code de procédure civile;
Vu la loi n° 92-1477 du 31 décembre 1992 modifiée relative
aux produits soumis à certaines restrictions de circulation et à
la complémentarité entre services de police, de gendarmerie
et de douanes;
Vu la loi n° 95-877 du 3 août 1995 portant transposition de la
directive 93/7 du 15 mars 1993 relative à la restitution de biens culturels
ayant quitté illicitement le territoire d'un Etat membre, notamment
son article 25;
Vu le décret n° 62-15 du 29 décembre 1962 modifié
portant règlement de la comptabilité publique;
Vu le décret
n° 75432 du 2 juin 1975 modifié instituant au ministère
de l'intérieur un Office central pour la répression du vol d'oeuvres
et objets d'art;
Vu le décret n° 93-124 du 29 janvier 1993 modifié
relatif aux biens culturels soumis à certaines restrictions de circulation;
Le Conseil d'État (section de l'intérieur) entendu,
Décrète :
DESIGNATION DE L'AUTORITE CENTRALE
Art. 1er. - L'Office central
de lutte contre le trafic des biens culturels est désigné comme
autorité centrale pour la France en vue d'exercer les fonctions relatives
à la restitution des biens culturels en application de l'article 3 de
la directive du 15 mars 1993 susvisée. A ce titre, il est chargé
de la coopération avec les autorités centrales compétentes
des autres Etats membres de la Communauté européenne.
L'office reçoit toutes informations des services de la police nationale,
des unités de la gendarmerie nationale, des services des douanes et du
ministère chargé de la culture, sur la base desquelles il pourrait
être présumé qu'un bien culturel est sorti de manière
illicite du territoire national ou du territoire d'un autre Etat membre.
L'office communique aux services du ministère de la culture toutes les
informations portant sur les biens culturels dont il présume qu'ils sont
sortis illicitement du territoire national ou du territoire d'un autre Etat
membre de la Communauté européenne.
DES BIENS CULTURELS SORTIS ILLIClTEMENT DU TERRITOIRE D'UN AUTRE ETAT MEMBRE DE LA COMMUNAUTE EUROPEENNE ET QUI SE TROUVENT EN FRANCE
Procédure administrative
Art. 2. - Lorsque l'Office
central de lutte contre le trafic des biens culturels constate la présence
sur le territoire national d'un bien culturel appartenant à l'une des
catégories définies à l'article 2 de la loi du 3 août
1995 susvisée et dont il présume qu'il est sorti illicitement
du territoire d'un Etat membre de la Communauté européenne, il
le notifie par tout moyen approprié, à l'autorité centrale
de cet Etat, désignée en application de la directive du 15 mars
1993 précitée.
La notification comprend la désignation du bien, sa localisation, les
éléments qui font présumer sa sortie illicite ainsi que
l'identité et le domicile du possesseur ou du détenteur. En outre,
elle précise, le cas échéant, la nature et la durée
des mesures conservatoires sollicitées par l'office pour assurer la conservation
matérielle du bien ou sa sauvegarde.
Art. 3. - Les demandes de recherche d'un bien culturel adressées à l'Office central de lutte contre le trafic des biens culturels par les autorités centrales des autres Etats membres doivent comporter les éléments suivants:
- désignation et description
du bien;
- certificat ou tout document de nature à établir que le bien
culturel appartient à l'une des catégories définies à
l'article 2 de la loi du 3 août l995 susvisée;
- tout élément permettant de présumer la sortie illicite
du bien;
- tout renseignement pouvant permettre la localisation du bien;
- le cas échéant, les nom, prénoms et adresse du propriétaire,
du possesseur ou du détenteur du bien.
Ces informations sont adressées à l'office dans la langue de líÉtat requérant avec une traduction en langue française.
Art. 4. - L'office notifie,
par tout moyen approprié, à l'autorité centrale de l'État
requérant le résultat de ses recherches et, le cas échéant,
la nature et la durée des mesures conservatoires qu' il a sollicitées
ou obtenues pour assurer la conservation matérielle du bien et sa sauvegarde.
Si la localisation du bien est connue de l'office, la notification comporte
la mention des nom, prénoms, domicile ou dénomination et siège
social du détenteur du bien et, le cas échéant, du propriétaire
ou du possesseur.
Art. 5. - S'il est manifeste que la demande de recherche ne relève pas du champ d'application de la loi du 3 août 1995 susvisée ou que le bien n'est pas sur le territoire, l'office en avise l'autorité centrale de l'État requérant.
Art. 6. - Lorsque, dans la
notification, líoffice demande que soit vérifiée la qualité
de trésor national du bien, il informe l'autorité centrale de
l'État membre que les mesures conservatoires qui ont été
ordonnées ou sont susceptibles de l'être cessent de produire effet
s'il n'a pas été procédé à la vérification
de la qualité de trésor national du bien ou si le résultat
des vérifications ne lui a pas été communique avant l'expiration
d'un délai de deux mois à compter de la date de notification.
L'office indique également que la notification fait courir, à
l'encontre de l'État requérant, le délai d'un an prévu
aux articles 5 et 10 de la loi du 3 août l995 susvisée.
Art. 7. - L'office peut demander au propriétaire, au possesseur ou au détenteur du bien de déterminer les conditions de date et de lieu dans lesquelles pourra être effectuée l'identification du bien culturel. L'identification est effectuée par les représentants de l'office et du ministère charge de la culture accrédités à cet effet ainsi que par une personne désignée par l'État membre concerné si ce dernier le demande.
CHAPITRE II
Mesures conservatoires
Art. 8. - Le président du tribunal de grande instance du lieu dans le ressort duquel se trouve le bien est compétent pour statuer, à la demande de l'office, sur les mesures conservatoires prévues à l'article 5 de la loi du 3 août 1995 susvisée.
Art. 9. - Lorsque l'office ne demande pas la mise en oeuvre de mesures conservatoires, il notifie au propriétaire, au possesseur ou au détenteur du bien. par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, que ce bien peut faire l'objet d'une action tendant à son retour sur le territoire d'un autre Etat membre.
CHAPITRE III
Procédure judiciaire
Art 10. - L'autorité
centrale de l'État requérant exerce l'action tendant au retour
du bien devant le tribunal de grande instance dans le ressort duquel se trouve
le bien.
Cette autorité centrale en informe l'office dans un délai d'un
mois 3 compter de la signification de l'assignation.
L'office informe, dans un délai de deux mois à compter de la signification
prévue à l'alinéa ci-dessus, les autorités centrales
des autres Etats membres de l'introduction d'une action en justice tendant au
retour du bien.
TITRE III
DES BIENS CULTURELS SORTIS ILLICITEMENT DU TERRITOIRE FRANCAIS ET QUI SE TROUVENT SUR LE TERRITOIRE D'UN AUTRE ETAT MEMBRE DE LA COMMUNAUTÉ EUROPEENNE
CHAPITRE I
Procédure de retour des trésors nationaux
Art. 12. - La décision de déclencher l'action tendant au retour d'un bien culturel sur le territoire français est prise par le ministre chargé de la culture. Cette demande est transmise par l'Office central de lutte contre le trafic des biens culturels aux autorités centrales des autres Etats membres. Les demandes de recherche d'un bien culturel, de même que les informations adressées en réponse aux Etats membres qui ont notifié la présence d'un bien culturel sur leur territoire, sont adressées à l'autorité centrale de l'Etat concerné par l'Office central de lutte contre le trafic des biens culturels.
Art. 13. - L' office informe l'autorité centrale de l'État concerné de l'introduction auprès du tribunal compétent de l'action tendant au retour d'un bien culturel.
Art 14. - Lorsque l'État français est devenu dépositaire d'un bien restitue, le ministre chargé de la culture peut décider d'exposer le bien dans un lieu qu'il détermine.
CHAPITRE II
Conditions de la restitution des biens
Art. 15. - La procédure prévue à l'article 90 du décret du 29 décembre 1962 susvisé est applicable aux remises de dette mentionnées à l'article 19 de la loi du 3 août 1995 susvisée.
Art. 16. - Le délai prévu 3 l'article 21 de la loi du 3 août 1995 susvisée est d'un mois.
TITRE IV
DISPOSITIONS COMMUNES
Art. 17. - Les catégories de biens culturels visées au 1° du deuxième alinéa de l'article 2 et au 1° de l'article 11 de la loi du 3 août 1995 susvisée sont celles qui figurent en annexe au présent décret.
Art 18. - La transmission des actes, demandes, attestations certificats et toutes autres pièces entre l'Office central de lutte contre le trafic des biens culturels et les autorités centrales des autres Etats membres peut être effectuée par tout moyen approprié sous réserve que le contenu du document reçu soit fidèle et conforme à celui du document expédié et que toutes les mentions qu'il comporte soient lisibles sans difficulté.
Art. 19. - Lorsqu'une action
tendant au retour d'un bien culturel est introduite par un Etat membre de la
Communauté européenne devant un tribunal français ou par
la France devant un tribunal díun Etat membre de la Communauté
européenne, l'office porte cette action à la connaissance du public
dans un délai de trois mois suivant son introduction.
Cette publicité comporte une description du bien. Elle est assurée
par la publication d'un avis dans le Journal officiel de la République
française et dans, au moins, un quotidien à diffusion nationale.
Une publicité est assurée dans les mêmes formes lorsque,
en vertu d'une décision prise par un tribunal d'un Etat membre de la
Communauté européenne devenue définitive, le retour d'un
bien sur le territoire national a été ordonné. L'avis doit
alors être publié dans un délai de trois mois à compter
de la date à laquelle la décision du tribunal devenue définitive
a été portée à la connaissance de l'État.
Art. 20. - Les notifications prévues aux articles 2 et 4 sont réputées effectuées à la date à laquelle elles ont été expédiées par l'office ou, sous sa responsabilité, par les personnes habilitées à cet effet.
TITRE V
MODIFICATION DU DECRET N° 93-124 DU 29 JANVIER 1993 RELATIF AUX BIENS CULTURELS SOUMIS A CERTAINES RESTRICTIONS DE CIRCULATION
Art. 21. - Après l'article 10 du décret du 29 janvier 1993 susvisé, il est inséré un article 10-1 ainsi rédigé:
"Art. 10-1. - Lorsqu'un bien
culturel entrant dans l'une des catégories figurant à l'annexe
du présent décret a été exporté sans qu'une
demande de certificat ait été effectuée, le ministre chargé
de la culture, avant de décider la mise en oeuvre de l'action tendant
au retour du bien prévue à l'article 14 de la loi n° 95-877
du 3 août 1995 portant transposition de la directive 93-7 du 15 mars 1993
relative à la restitution des biens culturels ayant quitté illicitement
le territoire d'un Etat membre, peut saisir la commission prévue à
l'article 5 du présent décret afin que celle-ci se prononce sur
la qualification du bien comme trésor national.
"L'avis de la commission est transmis à l'Office central de lutte
contre le trafic des biens culturels."
Art. 22. - Le garde des sceaux, ministre de la justice, le ministre de la défense, le ministre des affaires étrangères, le ministre de l'intérieur, le ministre de l'économie et des finances, le ministre de la culture et le ministre délégué au budget, porte parole du Gouvernement, sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent décret qui sera publié au Journal officiel de la République française.
Fait à Paris, le 25 mars 1997.
Par le Premier ministre, |
Le ministre de la culture, |
Le garde des sceaux, ministre de la justice, |
Alain Juppé | Philippe Douste-Blazy | Jacques Toubon |
Le ministre de la défense, |
Le ministre des affaires étrangères, | Le ministre de l'intérieur, |
Charles Millon | Hervé de Charette | Jean-Louis Debré |
|
Le ministre délégué
au budget, |
|
Jean Arthuis |
Alain Lamassoure |
ANNEXE
RELATIVE AUX CATÉGORIES DE BIENS CULTURELS VISEES A L'ARTICLE 2 DU DECRET
SEUILS (en écus) |
||
1. |
Objets archéologiques ayant plus de 100 ans d'âge provenant de:
|
0 |
2. | Eléments faisant partie intégrante de monuments artistiques, historiques ou religieux et provenant du démembrement de ceux-ci, ayant plus de 100ansd'âge | 0 |
3. | Tableaux et peintures faits entièrement à la main sur 150000 tout support et en toutes matières (1) | 150.000 |
4. | Mosaïques autres que celles entrant dans les catégories 1 ou 2 et dessins faits entièrement à la main sur tout support et en toutes matières (1) | 15.000 |
5. | Gravures, estampes, sérigraphies et lithographies originales et leurs matrices respectives, ainsi que les affiches originales (1) | 15.000 |
6. | Productions originales de l'art statuaire ou de la 50000 sculpture et copies obtenues par le même procédé que l'original (1), autres que celles qui entrent dans la catégorie 1 | 50.000 |
7. | Photographies, films et leurs négatifs (1) | 15.000 |
8. | Incunables et manuscrits, y compris les cartes géographiques et les partitions musicales, isolées ou en collection (1) | 0 |
9. | Livres ayant plus de 100 ans d'âge isolés ou en collection | 50.000 |
10. | Cartes géographiques imprimées ayant plus de 200 ans d'âge | 15.000 |
11. | Archives de toute nature comportant des éléments de plus de 50 ans d'âge, quel que soit leur support | 0 |
12. | a) Collection (2)
et spécimens provenant de collections de zoologie, de botanique, de minéralogie, d'anatomie |
50.000 |
. | b) Collections
(2) présentant un intérêt historique, paléontologique, ethnographique ou numismatique |
50.000 |
13. | Moyens de transport ayant plus de 75 ans d'âge | 50.000 |
14. |
Tout autre objet d'antiquité non compris dans les catégories 1 à 13:
|
50.000 |
. |
|
50.000 |